mardi 26 mars 2013

Coeur de Dragon (1996)


Certains films vieillissent mieux que d'autres. Si, par exemple, la trilogie "Retour vers le futur" se bonifie avec l'âge, d'autres oeuvres souffrent davantage du passage des années. A titre d'exemple, on pourrait citer "S.O.S. Fantômes" qui est devenu franchement kistch (attention, ceci est mon avis et n'engage que moi), sans cependant sombrer dans la ringardise. "Coeur de dragon", réalisé en 1996 par Rob Cohen (à qui l'on doit aussi "Daylight", "XxX" ou plus récemment "Fast and Furious") s'aventure sur le terrain particulier de l'heroic-fantasy. A l'époque, "Le Seigneur des Anneaux" n'était qu'un rêve dans la tête de son réalisateur et n'avait pas encore révolutionné le genre, dans lequel on trouvait quelques perles mais aussi pas mal d'authentiques nanars (de "Lancelot" à "Prince Valiant", par exemple).

En l'an 934, le prince Einon est gravement blessé lors d'une révolte paysanne, au cours de laquelle son père est tué. Sous l'impulsion de sa mère et le regard de son précepteur, le chevalier Bowenn, il est sauvé par un dragon, au sort duquel il est désormais lié.
Devenu roi, Einon devient, quelques années plus tard, un despote sanguinaire. Bowenn, quant à lui, s'efforce d'exterminer tous les dragons, qu'il rend responsables du destin de celui qui fut son élève. Sa route va croiser celle du dernier de ceux-ci, Draco.

Essentiellement basé sur la présence du dragon (on est alors à l'aube des effets spéciaux numériques), ce film  ne dispose pas, reconnaissons-le d'emblée, d'un scénario particulièrement complexe ou surprenant. L'intrigue, toute linéaire, est des plus classiques, et c'est là le plus grand défaut du film. Voilà, c'est dit.

Si, en version originale, le dragon du titre avait la voix de Sean Connery, c'est le grand Philippe Noiret qui lui prêta ses cordes vocales pour la version française. Cela donne un résultat assez curieux et qui sonne souvent "faux", ou du moins ne confère pas au dragon le charisme qu'il a en version originale. 

La bande originale est un des points positifs de ce film : il faut dire qu'elle a, depuis, été utilisée à maintes reprises. On pourra, de même, reconnaître que la réalisation de Rob Cohen est efficace, à défaut d'être transcendante. S'il est un élément à blâmer dans ce film, c'est cependant le scénario qui, en plus d'être prévisible au possible, use de tous les clichés les plus caricaturaux, quand il n'accumule pas les longueurs et les rebondissements inutiles.

Le spectateur le plus indulgent se consolera avec le jeu de Dennis Quaid (un acteur sous-estimé qui n'eut pas la carrière qu'il méritait) et le rôle, secondaire mais mémorable, de Pete Postelthwaite en moine (!). David Thewlis, remarqué peu avant dans un tout autre registre avec "Naked" de Mike Leigh, est en roue libre et livre une prestation caricaturale, dans laquelle on peine à voir l'étendue de son talent. On remarquera le rôle féminin tenu par Dina Meyer, aujourd'hui essentiellement connue pour ses prestations télévisuelles.
La version française, une fois de plus, fait plus de mal que de bien aux personnages, soit dit en passant.

Déjà un brin pataud à l'époque de sa sortie, "Coeur de dragon" est (c'est un comble !) un divertissement souvent ennuyeux (surtout quand on le visionne avec le regard d'un spectateur d'aujourd'hui), que ne parviennent pas à sauver quelques jolis moments. S'il fut bien accueilli (il reçut le Saturn Award ), force est d'avouer que ce film a bien vieilli et ne supporte plus guère la comparaison avec les canons actuels du genre. Face à un public devenu exigeant, et sur un territoire qui n'est plus réservé aux films mineurs, "Coeur de dragon" fait aujourd'hui pâle figure.





lundi 18 mars 2013

Un plan parfait (2012)



Depuis le succès démesuré et improbable de "Bienvenue chez les Chtis", Dany Boon est devenu l'un des poids lourds du cinéma français, et fait partie des acteurs dont le seul nom peut suffire à rentabiliser un film. On en a eu la preuve avec le très moyen "Rien à déclarer" (qui réutilisait la méthode déjà fort éprouvée du duo que tout oppose). En 2012, c'est au rayon déjà surchargé de la comédie romantique qu'on retrouva le nordiste préféré des Français, avec "Un plan parfait". 

Le plan parfait du titre est celui échafaudé par Lisa, qui vit le parfait amour avec son dentiste de conjoint. Or, il y a un "hic". Toutes les femmes de sa famille ont vu leur premier mariage échouer. Elle décide donc de séduire le premier venu, de l'épouser, puis d'en divorcer aussitôt, avant de convoler pour de bon. Le premier venu en question est Jean-Yves, baroudeur qu'elle devra suivre au Kenya, puis à Moscou pour parvenir à ses fins...ou pas.

Qui dit "comédie romantique" implique l'acceptation d'un schéma difficilement contournable : les deux protagonistes se rencontrent, commencent par se détester, avant de se rendre compte qu'ils sont faits l'un pour l'autre. Après avoir vaincu un obstacle déterminant, les deux tourtereaux finissent dans les bras l'un de l'autre. Happy end, le public est satisfait, tout va bien. Vous pourrez vérifier : cela fonctionne avec tous les films de ce registre, ou peu s'en faut. En ce qui concerne "Un plan parfait", il respecte à la lettre les codes du genre et, de ce point de vue, fonctionne plutôt bien. Son réalisateur, Pascal Chaumeil, avait précédemment fait ses preuves dans ce domaine avec "L'arnacoeur", à mettre au compte des réussites du genre.

Au chapitre des points positifs, notons aussi le procédé narratif utilisé par le réalisateur. L'histoire de Lisa et Jean-Yves est racontée lors d'un réveillon à une jeune femme fraîchement séparée et en plein désespoir. Accompagnant ce personnage, le spectateur accroche volontiers à l'histoire qui lui est narrée.

Si "Un plan parfait" s'était contenté d'être une comédie romantique classique, nul doute que l'entreprise aurait figuré en bonne place dans cette niche cinématographique. Seulement, présence de Dany Boon oblige, la production a cru bon de faire de ce film une bonne vieille comédie à la française, avec tous les défauts que cela implique. Gags lourds, situations pesantes, nombreuses sont les scènes où "Un plan parfait" semble sombrer dans l'ornière, perdant la légèreté qui l'emportait l'instant d'avant. 

Dany Boon, acteur le mieux payé de France, devra sans doute revoir ses prétentions à la baisse après le peu de succès que reçut "Un plan parfait". S'il excelle dans les scènes drôles, il est rarement émouvant. Face à lui, Diane Kruger, décidément sublime, fait ce qu'elle peut pour se dépêtrer de cette comédie pataude aux multiples longueurs et effets faciles, mais semble bien embarrassée de se retrouver là, après avoir fait montre de sa grande classe dans des films tels que "Inglorious basterds" ou "Troie". Pour son premier essai dans le registre de la comédie, la belle livre une prestation inégale. 

Un gros budget ne fait pas un bon film, définitivement. En l'occurrence, le public ne s'y est pas laissé prendre,  puisque la sortie en salles de "Un plan parfait" n'a pas suffi à le rentabiliser. Ne nous faisons cependant pas de souci pour les producteurs de ce film : je suis persuadé que, d'ici peu, il vaudra à TF1 un carton d'audience du dimanche soir. Cette comédie française, voire franchouillarde, n'a hélas rien d'original et aura du mal à provoquer les rires promis. Symptomatique d'une certaine vision du cinéma français, ce film ne restera pas dans les mémoires.




jeudi 14 mars 2013

Love, Wedding, Marriage (2010)




On a connu par le passé le cas de téléfilms si bien réalisés qu'ils eurent droit à une deuxième carrière dans les salles obscures. Je citerais, à titre d'exemple, "Duel" de Steven Spielberg, réalisé pour la télévision américaine et finalement projeté dans les salles européennes avec le succès que l'on sait. Il existe aussi des cas d'école où le film fit le trajet inverse : "Amour, mariage et petits tracas" (dont le titre original était "Love, Weddding, Marriage"), après une sortie calamiteuse aux Etats-Unis (quelques milliers de dollars de recette seulement) est devenu un simple téléfilm pour le marché européen. Dans l'hexagone, c'est M6 qui a hérité du bébé : il a été diffusé en novembre dernier et, si vous n'êtes pas sages, sera probablement rediffusé entre deux émissions de télé-poubelle (mais je m'égare)...

Conseillère conjugale, Ava vient d'être demandée en mariage par son petit ami. C'est le moment que choisit sa mère pour demander le divorce. Ses certitudes volant en éclats, Ava découvre que la vie n'est pas aussi simple que cela et qu'elle ne vit pas dans un conte de fées.

Ce film est l'unique réalisation à ce jour de Dermot Mulroney, plus connu pour ses prestations d'acteur (par exemple dans "Le mariage de mon meilleur ami", où il interprétait le meilleur ami du titre, ou dans le très bon "Territoire des loups"). Gageons qu'elle restera sans lendemain, l'échec de ce film ayant été parmi les plus cuisants qui soient.

Je n'irais pas par quatre chemins : ce bide monumental était mérité. Il n'y a pas grand-chose à sauver de ce (télé)film, hormis peut-être l'interprétation (et encore, Kellan Lutz, qui interprète le futur marié, est d'une extrême fadeur et aurait mieux fait de se contenter de son rôle dans la saga "Twilight") : les vétérans Jane Seymour (le Docteur Quinn du petit écran) et James Brolin prouvent leur talent, même s'il est sous-exploité, tandis que Mandy Moore et Jessica Szohr sont l'atout charme du film. On notera au passage l'apparition brève mais marquante de Christopher Lloyd, l'inoubliable Doc Brown de "Retour vers le futur".

Le scénario, qui ne surprendra absolument personne, enfile les clichés les plus éhontés sur le mariage et le célibat, et sur les femmes et les hommes en général. Pour les habitués des comédies romantiques (genre extrêmement codifié), il ne récèle donc aucune nouveauté. Quant aux autres, il ne présente pour eux aucun intérêt.
La réalisation est d'une platitude extrême et confirme la sanction : les salles obscures méritent mieux que cela.

Prévisible de bout en bout, à peine amusant, et laborieusement réalisé, "Amour, mariage et petits tracas" mérite l'oubli, tout simplement. 
En ce qui me concerne, j'aimerais beaucoup que Dermot Mulroney me rende les 90 minutes de ma vie qu'il a volé.



dimanche 10 mars 2013

L'entente cordiale (2006)


Il y a quelques semaines de cela, était diffusé sur une chaîne (publique) de la TNT un film français dont je n'avais aucun souvenir. Il faut croire que sa sortie n'avait pas fait beaucoup de bruit. Pourtant, les deux rôles principaux étant tenus par Daniel Auteuil et Christian Clavier (qui sont pourtant parmi les acteurs français les plus bankables), on aurait pu s'attendre à ce que "L'entente cordiale" fasse du bruit. Il n'en fut rien, cependant.

T'as palpé combien pour ce film, toi ?Dans cette comédie "diplomatique", un terroriste russe s'est emparé d'une puce électronique qu'il compte vendre au plus offrant. Représentant la France, le piètre diplomate François de la Conche est chargé de mener la transaction, épaulé en cela par Jean-Pierre Moindrau, un interprète adepte du mensonge et des coups fourrés.

Comme on le devine au pitch qui précède, on est ici dans un territoire maintes fois exploré, celui du duo que tout oppose (l'affiche rappelle d'ailleurs fortement le médiocre "Tais-toi" de Francis Veber, spécialiste de la déclinaison ad nauseam de ce genre). Mais, si la recette est éprouvée et est à l'origine de nombreux succès cinématographiques, il ne suffit pas de l'appliquer bêtement pour qu'elle assure un triomphe.

Au visionnage, on comprend vite pourquoi "L'entente cordiale" fut un terrible bide (un petit peu plus de 100 000 spectateurs). Dans cette comédie poussive et en aucun cas amusante, se trouvent concentrées toutes les tares que le cinéma français peut accumuler : scénario écrit sur un coin de table, réalisation à peine digne d'un épisode de "Plus belle la vie", interprétation par-dessus la jambe, bande originale au bontempi, tout est réuni pour faire de ce film une catastrophe.

Doté d'un budget plus que confortable (pas loin de 20 millions d'euros, dont je n'ose imaginer la proportion ayant servi de cachet aux deux acteurs principaux), "L'entente cordiale" est un immense foutage de gueule du début à la fin, dont j'ose espérer qu'il n'a pas été financé par le contribuable français (il est des jours où l'on pourrait maudire le système d'avance sur recettes).

"L'entente cordiale" essaie de trouver l'équilibre entre comédie et film d'action sans jamais réussir, dans l'un ou l'autre domaine. Louchant fortement du côté de "L'opération Corned-Beef", ce film est filmé sans aucun talent : Vincent de Brus, son réalisateur, a cessé de sévir depuis et ce n'est pas une grande perte. 
Christian Clavier est égal à lui-même, se contentant de décalquer le même personnage depuis des lustres. J'ai décidément du mal à comprendre l'engouement pour ce comédien, qui semble avoir totalement oublié quec'est l'acteur qui doit se glisser dans la peau du personnage et non l'inverse.
Le constat est plus dramatique pour Daniel Auteuil, dont certaines compositions magistrales (de "Manon des Sources" à "MR73") avaient éclipsé les années d'errance cinématographique ("Les sous-doués", par exemple). 
Quant aux seconds rôles, je préfère imaginer qu'ils furent vicitmes d'un moment d'égarement ou qu'ils ont accepté de tourner dans ce film pour des raisons fiscales. Que vinrent faire François Morel ou John Cleese (pour ne citer qu'eux) dans une pareille galère ?

Pour faire bref, cette "Entente cordiale", comédie française dans ce que ce registre contient de pire (ou presque) est un film à oublier de toute urgence.






dimanche 3 mars 2013

Stay (2005)




Marc Forster, déjà couvert de lauriers pour "A l'ombre de la haine" (qui valut un Oscar à Halle Berry) et "Neverland", aurait pu se permettre à peu près tout : il choisit de mettre en scène "Stay", thriller psychologique (ou plutôt psychanalytique) complexe, mettant en scène Ewan McGregor, Naomi Watts, Ryan Gosling et Bob Hoskins. A l'arrivée, le film fut un bide total, malgré une affiche des plus prestigieuses et un pitch plutôt intrigant.

Sam est psychiatre. Il voit un jour arriver dans son cabinet un jeune homme qui lui annonce qu'il se suicidera dans trois jours, à minuit. Dès lors, il va tout mettre en oeuvre pour empêcher cette issue funeste, quitte à sombrer dans la folie.

Je ne vous ferai pas l'injure de vous révéler plus d'éléments de cette intrigue, qui joue avec la réalité et les nerfs du spectateur. Sachez juste qu'il ne s'agit pas seulement, si cela peut vous rassurer, d'un film sur la psychanalyse (quoique...) mais aussi d'un thriller et d'un bel exercice de narration.

C'est esthétiquement très beau, à un point que c'en est souvent perturbant (mais c'est voulu) et remarquablement interprété : le trio d'acteurs (Ewan McGregor, Naomi Watts et Ryan Gosling, excusez du peu) se prête avec le brio qu'on leur connait à un exercice de style dans lequel bien d'autres auraient paru patauds. Alors qu'il n'avait pas encore connu le succès qu'on lui connaît aujourd'hui, Ryan Gosling mérite d'ailleurs une mention spéciale pour son interprétation de jeune homme névrosé. 

Le scénario est signé de David Benioff, actuel showrunner de la sublime série "Games of Thrones". Complexe au point de nécessiter (pour les plus intrigués) un deuxième visionnage, l'histoire narrée dans "Stay", si elle ne lui valut pas la reconnaissance qu'il aurait pu attendre, augure d'un vrai talent de storyteller. La réalisation de Forster, qui s'aventure souvent sur des terrains quasiment oniriques, ajoute d'ailleurs une dose de complexité à l'ensemble. il aurait sans doute fallu s'efforcer au contraire de donner quelques pistes au spectateur, au lieu de l'entraîner dans ce tourbillon au risque de le perdre. 

On se prend à rêver à ce qu'aurait donné pareil script, mis en scène par David Fincher : un chef d'oeuvre, probablement. Au lieu de cela, "Stay" est un film déroutant, mais pas forcément très lisible pour le premier spectateur venu. C'est sans doute là que se situe l'échec de l'entreprise : malgré ses immenses qualités, "Stay" peut paraître crypté. Sans préjuger de l'intellect du public consommateur de films à gros budget, son épaisseur le condamnait sans doute à l'échec. 

Forster prit ensuite les commandes du vingt-deuxième James Bond ("Quantum of Solace"), avec la difficile mission de faire aussi bien que le précédent. Son prochain film, "World War Z", mettra en scène Brad Pitt aux prises avec une invasion de zombies. Le moins que l'on puisse dire, c'est qu'il s'agit d'un réalisateur surprenant, même si nombre de ses films connurent l'échec commercial (on pourrait citer "Machine Gun Preacher"). Dans le cas de "Stay", une deuxième séance s'impose : le film en vaut la peine (même si le spectateur doit s'accrocher).