lundi 8 juin 2015

Tideland (2005)


Terry Gilliam, qui fit partie des géniaux trublions du Monty Python Flying Circus, est un des habitués de ce blog. Nombre de ses films n'eurent en effet pas le succès public escompté. Tiré d'un roman de Mitch Cullin, "Tideland" est emblématique de l'oeuvre de Terry Gilliam, par son esthétique, les thèmes évoqués et, hélas, l'échec qu'il rencontra à sa sortie dans les salles obscures, récoltant à peine 200 000 dollars. Même au plus creux de la vague, Terry Gilliam connut rarement pareille déconvenue. Cela était-il mérité ?

La petite Jeliza-Rose a une drôle de vie. Quand sa mère meurt d'une overdose, son père, rocker has-been héroïnomane l'emmène dans la maison de son enfance. Dans la demeure en ruine, tandis que son père s'adonne à son addiction, la petite fille, accompagnée des têtes de poupée qui sont ses seuls jouets, s'invente un monde imaginaire et fait de drôles de rencontres.
A bien y réfléchir, elle n'a pas grand-chose à envier à Alice, qui passa elle aussi de l'autre côté du miroir.

Annoncé par son réalisateur comme la rencontre improbable entre "Psychose" et "Alice au pays des merveilles", "Tideland" est une oeuvre à part, comme chacun des films de Terry Gilliam. D'une noirceur parfois effrayante, ce film convoque des thèmes chers à son auteur. L'enfance y est confrontée à la mort, tout comme l'imaginaire télescope souvent le réel, dans une esthétique souvent foutraque, on se reconnait sans mal la patte de l'ancien Monty Python. Souvent filmé caméra à l'épaule, "Tideland" ne prend même pas la peine de prendre du recul et plonge son spectateur dans le bric-à-brac qui tient lieu d'univers à Terry Gilliam.

Au centre de "Tideland", il y a la jeune Jodelle Ferland, qui irradie d'énergie et livre une interprétation remarquable pour son jeune âge. Bien avant de faire les beaux jours de la série "Kingdom Hospital", et après avoir été remarquée dans "Silent Hill", la jeune actrice prouve que des enfants peuvent jouer juste, voire avec talent. Jodelle Ferland a d'autant plus de mérite que l'histoire qu'elle traverse dans "Tideland" est tout sauf un conte de fées. Rien ou presque n'est épargné à la jeune héroïne, et l'on frémit à l'évocation de l'enfance qu'elle incarne aux yeux du réalisateur, jusque dans ses incursions dans le monde imaginaire qu'elle se construit pour fuir sa triste réalité. Avec l'esthétisme délirant du film, elle est le plus bel atout de ce film, il faut le reconnaître. Autour d'elle, dans des rôles plus accessoires, mais néanmoins marquants, on remarquera les prestations de Jeff Bridges, de Brendan Fletcher ou de Jennifer Tilly. Afin de rendre au mieux justice à l'interprétation, je vous conseille au passage de visionner "Tideland" en Version Originale, la VF étant particulièrement bâclée et agaçante.

Affichant fièrement sa touche, Terry Gilliam montre avec "Tideland" qu'il n'a en rien renoncé au ton qui est le sien, malgré les concessions qu'il fit à un cinéma plus commercial (je songe évidemment au très réussi "L'armée des douze singes"). Le conte extrêmement sombre et sale qu'est ce film ne pouvait être réalisé que par lui et lui ressemble bien plus que son récent "Zero Theorem". A la fois poésie visuelle et conte horrifique qui laisse son public mal à l'aise longtemps après le visionnage, "Tideland" reste cependant maîtrisé de bout en bout.





10 commentaires:

  1. Je n'ai rien contre Gilliam (même si, en dehors des Monty Python, ce n'est pas ma tasse de thé) mais je déteste profondément ce film. J'ai l'impression que, sous prétexte que ça parle de drogue, de pédophilie et d'imaginaire, Gilliam s'est permis de faire n'importe quoi en atteignant des sommets de connerie monumentale et de dégoût. Je trouve ce film inutilement malsain, ses références agaçantes (on a l'impression que Gilliam découvre la littérature et le cinéma comme un môme de 15 ans) et en plus de tout ça, je le trouve d'un ennui à mourir. Et en plus, j'aurais volontiers giflé Jodelle Ferland, péniiiible.

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    1. Zut, j'ai énervé Tina.
      C'est vrai que je ne savais pas trop quoi penser devant ce film, qui exploite des thèmes sales et sombres, mais j'ai pris le parti d'accepter la démarche de Gilliam qui y est, me semble-t-il, le plus lui-même. Mais je comprends qu'il déplaise et qu'il choque (j'ai été mal à l'aise plus d'une fois).

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    2. Non, c'est Terry Gilliam qui m'a énervée :o

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  2. J'ai un peu lâché Gilliam dernièrement et même son Parnassus ne m'a pas franchement emballé. J'ai donc laissé filer ce "tideland" dans les limbes de sa filmo maudite. Mais ton avis encourageant est une invitation à une séance de rattrapage qui se fera je l'espère un de ces jours. Et puis un film avec Jeff Bridges peut-il être totalement mauvais ?

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    1. Merci pour ta lecture, Prince...attention cependant, ce Gilliam est à prendre avec précaution, comme expliqué plus haut dans ma réponse à Tina ;-)

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  3. J'ai vu "Tideland" il y a... longtemps. Je n'en garde pas un bon souvenir. J'avais trouvé ça inutilement et artificiellement glauque. Le genre de films qui te met mal à l'aise...

    Si l'occasion se présente, il faudrait que je le revoie, puisque j'ai désormais une plus grande "maturité" cinématographique. Je ne vais pas courir après (et pourtant, j'ai un grand respect pour Terry Gilliam, jusque dans ses excès), mais je ne le bouderais pas définitivement sur un vieux préjugé.

    Bon, a priori, des Gilliam que je connais, c'est celui qui m'a le moins plu.

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    1. Bonsoir Martin, ce "Tideland" met mal à l'aise, c'est vrai et on n'en sort pas facilement. Ce n'est pas mon préféré de son auteur (j'ai une vraie faiblesse pour "Les aventures du Baron de Münchausen" et évidemment "Brazil")...
      Merci de ton passage, fidèle lecteur :)

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  4. Il faut que je m'intéresse plus sérieusement à sa filmo. Ce film me tente bien, grâce à son article. Je le note.

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    1. Je pense sincèrement que Terry Gilliam a mis beaucoup de lui-même dans ce film assez éprouvant. Ce n'est peut-être pas la meilleure porte d'entrée sur son oeuvre.

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