En 1995, Didier Le Pêcheur, après un court métrage remarqué, offrit aux spectateurs un véritable OVNI cinématographique : "Des nouvelles du Bon Dieu". Après avoir remporté le Grand Prix du Festival du film d'humour de Chamrousse (auquel succèdera en 1997 le Festival de l'Alpe d'Huez), le film eut un succès d'estime : comprenez par là que les critiques l'honorèrent, mais que peu de spectateurs firent le déplacement pour aller le voir dans les salles.
Nord et Evangile se posent des questions pour le moins existentielles, depuis le suicide de leur écrivain préféré. Disposons-nous tous de notre libre artbitre ? Et si nous étions finalement des personnages de roman, sortis de l'imaginaire d'un tout puissant littérateur ?
Ne pourraient-ils pas aller voir le romancier qui décide de tout, pour lui demander de leur donner un parcours qui leur sied plus ? Ni une ni deux, bien décidés à tirer tout cela au clair, et si possible, à changer leur vie (puisqu'elle semble écrite), ils vont se tourner vers l'Eglise, quitte à s'en prendre directement au plus proche représentant de Dieu sur Terre : le Pape.
Avec un pitch aussi barré, j'ignore si, aujourd'hui, un producteur se serait risqué à financer un film. C'est donc avec un regard plein de nostalgie (et de regret aussi, parfois) qu'on reverra "Des nouvelles du Bon Dieu". Audacieux, décalé, incisif, voilà pour les qualificatifs pouvant s'appliquer à l'histoire de Nord et Evangile. Au service de cette fable plutôt rock'n roll (scénarisé par le réalisateur avec la collaboration du regretté Artus de Penguern qui fait d'ailleurs une apparition dans le film), une pléiade de comédiens livre une prestation aux petits oignons : c'est avec émotion qu'on retrouve notamment la troublante Marie Trintignant et un Jean Yanne remarquable. A leurs côtés, la trop rare Maria de Medeiros, l'excellent Michel Wuillermoz et le très télégénique Christian Charmetant s'amusent énormément : du coup, le spectateur aussi. Dans des rôles plus secondaires, les plus observateurs remarqueront la présence de Matthieu Kassovitz et de Dany Brillant (oui, vous avez bien lu, le chanteur de charme), et j'en oublie. Rien que pour le casting, le film vaut donc le détour, d'autant plus que ces acteurs sont servis par un scénario plutôt malin et suffisamment irrévérencieux pour qu'on en soit nostalgique (on appréciera les dialogues particulièrement succulents). Enfin, la réalisation, sans déployer des trésors d'inventivité, reste honorable. Que "Des nouvelles du Bon Dieu" n'ait pas plus marqué les mémoires est donc un mystère, voire une injustice.
La carrière de Didier Le Pêcheur fut ensuite sinueuse, puisqu'il se dirigea ensuite vers le film noir, avant d'être "récupéré" par la télévision (notamment pour la série "Malone" ou "No limit"). Devenu artisan au service du petit écran (celui qui gouverne bien souvent aux destinées du grand), ce réalisateur en dit finalement long, par son parcours, sur celui du septième art, qui a souvent bradé sa créativité au profit d'un formatage très en vogue. Dommage que son premier film n'ait pas, en son temps, séduit plus de spectateurs : il aurait pu suivre une toute autre carrière ou (mieux encore) faire des émules.
J'aimerais en effet revoir ce film. Je l'ai un peu oublié, mais je me souviens que j'avais beaucoup aimé.
RépondreSupprimerIl est clair que ce genre de film est quasiment invisible (j'en veux pour preuve la difficulté que j'ai eu à trouver une bande-annonce visionnable)....et c'est bien dommage, à mon avis.
SupprimerLe film était génial, certes, mais il faut avouer aussi que sa démarche narrative ressemble beaucoup a celle de Pirandello dans "Six personnages en quête d'auteur".
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