Alors qu'il rencontre en ce moment le succès public avec "Le domaine des Dieux", il m'a semblé pertinent de jeter un coup d’œil au film précédent d'Alexandre Astier, créateur de "Kaamelott". A l'opposé de sa récente adaptation des aventures du Gaulois le plus célèbre du monde, "David et Madame Hansen", malgré la présence à l'écran d'Isabelle Adjani, sortit presque en catimini et fut un échec commercial. En méritait-il autant (ou si peu, d'ailleurs) ?
David, ergothérapeute dans une clinique suisse, se voit, à la faveur d'un remplacement, confier une étrange patiente, Madame Hansen-Bergmann. Cachée derrières ses lunettes noires et ses longs cheveux blancs, cette femme étrange et visiblement fortement perturbée (elle peut être violemment provocante puis sombrer dans une profonde détresse) doit être accompagnée par David pour une promenade en ville. Entre le soignant, encore plein des idéaux de sa mission et la patiente, que la vie a abîmée plus qu'on ne peut l'imaginer, une étrange relation va se construire.
Alexandre Astier est un véritable homme-orchestre, comme on a déjà pu le voir sur sa déjà culte série "Kaamelott". Réalisateur, acteur, scénariste et compositeur, il a porté ce film du début à la fin, avec une foi qui force le respect, tant elle se respire du début à la fin. Traitant du traumatisme avec finesse, cette oeuvre n'est clairement pas ce qu'on pouvait attendre du réalisateur pour son premier film, jusqu'ici catalogué dans le registre des comiques. Si quelques dialogues affichent la saveur et le piquant qu'Alexandre Astier sait leur imprimer. L'homme affirme ici, une fois de plus, son talent de dialoguiste et son amour des mots. Il faut dire que la distribution est au diapason de la belle partition préparée pour elle. Hormis le réalisateur-scénariste, qui s'est réservé l'un des rôles-titres (ce qui ne veut pas dire pour autant que la tâche soit aisée), la prestation exceptionnelle d'Isabelle Adjani démontre, s'il en était besoin, que l'actrice n'a rien perdu de son talent. Capable d'agacer comme d'émouvoir aux larmes, celle qui est un monument du cinéma français fait montre de sa grâce, intacte après toutes ses années où elle fut trop rare. Il ne faut cependant pas occulter le reste du casting : mêmes les rôles les plus secondaires sont remarquablement bien tenus, et on saluera les performances de Julie-Anne Roth et de Victor Chambon, notamment.
Après les lauriers que je viens de tresser à ce petit film, souligner ses quelques défauts peut paraître délicat. Pour un coup d'essai, "David et Madame Hansen" n'en est pas pour autant un coup de maître. On pourra lui reprocher quelques facilités, mais c'est sans doute parce que ce film cherche la lumière dans les ténèbres de l'âme, au fin fond de la détresse. Est-ce pour autant une erreur que de vouloir tendre vers l'optimisme ? Idéaliser parfois trop ses personnages et leurs intentions peut être vu comme un excès de candeur, mais les spectateurs les plus indulgents y verront une envie d'espoir, gageons-le.
Traitant d'un sujet difficile et douloureux, "David et Madame Hansen", avec son fabuleux duo d'acteurs (en particulier la merveilleuse Isabelle Adjani) aurait mérité plus d'égards lors de sa sortie. Réalisé avec talent, écrit avec finesse, ce film vaut plus que le tiède accueil qui fut le sien. Alors qu'Alexandre Astier rencontre le succès populaire, ceux qui se pencheront sur son premier long métrage risquent une belle et émouvante surprise...
Je dois dire que ça fait envie. D'autres priorités ciné ont fait que j'ai loupé ce bon petit film en salles, mais ta chronique va m'inciter à le rattraper à la télé si l'occasion se présente.
RépondreSupprimerUne anecdote amusante: il paraît qu'au départ, Alexandre Astier n'avait pas pris Isabelle Adjani, mais que la comédienne a finalement remplacé au pied levé l'autre grande star d'abord prévue pour le rôle: Alain Delon ! Pas sûr qu'il faille le regretter, d'après ce que tu dis.
Bonne soirée, Laurent :)
Je ne savais pas trop à quoi m'attendre avec ce film, malgré la sympathie que j'ai pour Alexandre Astier, et j'ai été agréablement surpris, comme tu as pu le lire. Et je ne suis pas sûr qu'avec Alain Delon (j'avais entendu parler de cette anecdote), l'alchimie aurait fonctionné...
SupprimerMerci de ta visite, Martin
Elle est jolie, Adjani, avec cette perruque grise. Je n'avais pas entendu parler de ce film. Ca donne envie de le découvrir. Je note.
RépondreSupprimerEn voyant ce film, j'ai mesuré à quel point cette grande actrice me manquait. Je serais très preneur de ton éventuel billet au sujet de ce film, Chonchon...
SupprimerMerci du passage !
Un rythme et une ambiance particulière, le film demande en effet un certain investissement de la part du spectateur. Mais le résultat en vaut, à mon sens, la peine, tant le récit et les personnages sont surprenants.
RépondreSupprimerOn est d'accord : ce film vaut qu'on se penche sur son cas. En ce qui me concerne, j'ai été séduit.
SupprimerMerci de ta fidélité à ces colonnes, 2flicsamiami !