Sujet sensible, voire tabou, la mort est au centre de quelques longs métrages mémorables. Je songe notamment à "Harold et Maude" ou, plus près de nous, au superbe "Au revoir là haut". En mettant en scène une entreprise de pompes funèbres, "Grand froid" et sa très belle distribution, prenait un risque : traiter de ce que deviennent les corps après leur trépas et de ceux qui en prennent soin n'était pas un sujet facile. Pour son premier film, Gérard Pautonnier a reçu un accueil public un peu frileux, malgré quelques bonnes critiques.
L'entreprise de pompes funèbres d'Edmond Zweck périclite : ses deux employés ne seront pas payés ce mois-ci. Heureusement pour eux, ils se voient chargés d'emmener un défunt vers son dernier domicile, un cimetière perdu au milieu de nulle part. Voilà donc Georges et Eddy partis enterrer un mort, suivis par sa veuve, son frère et un prêtre énergique et impatient. Ils ne sont pas au bout de leurs peine et c'est un drôle de périple qui les attend.
Dès ses premières images, "Grand froid" donne le ton : c'est le froid qui domine (avec un titre pareil, c'est normal) et qui est omniprésent. Dans une bourgade sans doute coincée quelque part entre la Belgique et la Pologne (c'est vous dire l'exotisme), les personnages n'ont pour se tenir chaud que leur chaleur humaine.
C'est la meilleure qui soit.

Cependant, après la mise en place de son univers macabre, Gérard Pautonnier peine à conclure l'affaire. Le scénario de "Grand froid" tourne souvent à vide, et l'humour dont il se réclame ne fonctionne pas toujours, désamorcé par des scènes plus lentes et parfois même dramatiques. On pense aux frères Coen, mais on regrette de ne pas trouver ici l'absurdité ou la causticité qui aurait fait de "Grand froid" une comédie noire et grinçante comme on peut les aimer.
Inégal, faute d'audace, ce premier film de Gérard Pautonnier vaut surtout pour ses acteurs et son esthétique. Il y fait à la fois très froid (à cause de l'ambiance) et chaud (grâce aux personnages). C'est déjà ça.