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jeudi 14 décembre 2017

Grand froid (2017)


Sujet sensible, voire tabou, la mort est au centre de quelques longs métrages mémorables. Je songe notamment à "Harold et Maude" ou, plus près de nous, au superbe "Au revoir là haut".   En mettant en scène une entreprise de pompes funèbres, "Grand froid" et sa très belle distribution, prenait un risque : traiter de ce que deviennent les corps après leur trépas et de ceux qui en prennent soin n'était pas un sujet facile. Pour son premier film, Gérard Pautonnier a reçu un accueil public un peu frileux, malgré quelques bonnes critiques.

L'entreprise de pompes funèbres d'Edmond Zweck périclite : ses deux employés ne seront pas payés ce mois-ci. Heureusement pour eux, ils se voient chargés d'emmener un défunt vers son dernier domicile, un cimetière perdu au milieu de nulle part. Voilà donc Georges et Eddy partis enterrer un mort, suivis par sa veuve, son frère et un prêtre énergique et impatient. Ils ne sont pas au bout de leurs peine et c'est un drôle de périple qui les attend. 

Dès ses premières images, "Grand froid" donne le ton : c'est le froid qui domine (avec un titre pareil, c'est normal) et qui est omniprésent. Dans une bourgade sans doute coincée quelque part entre la Belgique et la Pologne (c'est vous dire l'exotisme), les personnages n'ont pour se tenir chaud que leur chaleur humaine. 
C'est la meilleure qui soit. 

Que ce soit par ses décors ou sa mise en scène, "Grand froid" impose un style, très rapidement et plonge son spectateur dans une ambiance unique, ou presque. Porté par ses interprètes, le film acquiert rapidement une identité propre, en grande partie grâce à ses personnages, à la fois insolites et terriblement humains. C'est encore une fois grâce à ses acteurs, tous remarquables, qu'il s'agisse de l'indispensable Jean-Pierre Bacri, d'Arthur Dupont, d'Olivier Gourmet ou des seconds rôles, dont Sam Karman ou Wim Willaert, pour ne citer qu'eux. 

Cependant, après la mise en place de son univers macabre, Gérard Pautonnier peine à conclure l'affaire. Le scénario de "Grand froid" tourne souvent à vide, et l'humour dont il se réclame ne fonctionne pas toujours, désamorcé par des scènes plus lentes et parfois même dramatiques. On pense aux frères Coen, mais on regrette de ne pas trouver ici l'absurdité ou la causticité qui aurait fait de "Grand froid" une comédie noire et grinçante comme on peut les aimer. 

Inégal, faute d'audace, ce premier film de Gérard Pautonnier vaut surtout pour ses acteurs et son esthétique. Il y fait à la fois très froid (à cause de l'ambiance) et chaud (grâce aux personnages). C'est déjà ça.





jeudi 9 mars 2017

Marie et les naufragés (2016)


Le cinéma français, en particulier dans le registre de la comédie, aura été source (pour moi, tout au moins) de nombreuses déceptions, ces dernières années. Mais je ne peux m'empêcher d'y revenir, espérant toujours y trouver la pépite qui sera l'objet de la réconciliation. La présence au casting de "Marie ett les naufragés" de Vimala Pons et d'Eric Cantona fut le motif de visionnage de ce film de Sébastien Betbeder (déjà évoqué dans ces colonnes pour "2 automnes, 3 hivers"). Ce petit film, passé sous les radars de pas mal de spectateurs, faisait-il partie de ceux à sauver ? 


Siméon, journaliste au chômage et père divorcé, erre dans Paris quand il croise le chemin de Marie, dont il trouvé le portefeuille dans la rue. Elle est dangereuse, à en croire Antoine, écrivain à la dérive, et ancien compagnon de la jeune femme. Sous les yeux d'Oscar, son colocataire, musicien somnambule, Siméon va pourtant suivre Marie, jusqu'à l'île de Groix. 

Les naufragés du titre sont les hommes qui gravitent autour de Marie, toute aussi naufragée dans sa vie, d'ailleurs. Déboussolés, les personnages de ce film le sont, un peu comme l'étaient déjà ceux de "2 automnes, 3 hivers". Sébastien Betbeder confirme avec ce long métrage son identité et sa touche personnelle, en grande partie parce qu'il se penche avec une belle tendresse sur des personnages un peu fracassés. Les filmant au plus près, au point qu'on se sente parfois juste à côté d'eux, il leur donne vie de jolie manière dans un drôle de petit film doux-amer, malgré quelques moments de pédalage à vide.

On pourra pointer les quelques moments de creux du scénario, dont on aurait aimé qu'il comporte plus de rebondissements et de moments forts. Dans le voyage initiatique et parfois foutraque de Siméon, suivant le sillage de Marie, et suivi par Oscar (j'espère que vous me suivez), l'impression d'improvisation et de remplissage se fait parfois sentir. Cela dit, le ton du film rend ces lacunes bien mineures, alors qu'elles auraient été impardonnables sur d'autres longs métrages.

Ce sont essentiellement les acteurs qui sont le capital charme de ce drôle de petit film. La Marie du titre, incarnée par Vimala Pons, à la fois vénéneuse et vulnérable, est le plus bel atout du film. Vimala Pons, à cette occasion, prouve une nouvelle fois qu'elle est un des grands espoirs du cinéma français (et qu'elle n'a pas forcément besoin de passer la moitié d'un film dans la tenue d’Ève pour le rendre attrayant). Face à elle, c'est surtout Eric Cantona que l'on a plaisir à revoir, incarnant remarquablement un homme au fond du trou, J'avoue avoir été moins convaincu par les prestations de Pierre Rochefort et de Damien Chapelle. Enfin, le temps de quelques scènes, l'indispensable Wim Willaert marque de son empreinte le film, même s'il s'agit plus d'une apparition que d'un véritable rôle.

Aussi modeste soit-il, "Marie et les naufragés", avec son ton doux-amer et, surtout, ses personnages profondément humains perdus dans leurs propres existences, méritait une plus large audience, sans cependant être inoubliable.

Ce film a été vu dans le cadre du Movie Challenge 2017, catégorie "Film avec un prénom dans le titre".


jeudi 11 février 2016

Je suis mort mais j'ai des amis (2015)


Alors que son tout récent "Les premiers les derniers" est à l'affiche, il m'a paru intéressant d'évoquer un des films où apparaissait récemment Bouli Lanners, acteur pas assez connu (et reconnu) à mes yeux. Mis en scène par Guillaume et Stéphane Malandrin, "Je suis mort mais j'ai des amis" promettait un esprit rock'n roll (à tous les sens du terme) trop souvent absent des long métrages actuels. Sans doute ce film franco-belge était il trop atypique, puisqu'il ne draina pas les foules lors de sa sortie.

Ce n'est pas parce qu'on est quinquagénaire qu'il faut ranger les guitares électriques et cesser de suivre le rock'n roll way of life. 
Ce n'est pas parce que le micro rend l'âme qu'il faut arrêter de chanter. 
Ce n'est pas parce que le chanteur du groupe meurt dans un accident bête qu'il faut renoncer à une tournée américaine. 
Ce n'est pas parce que ses amis découvrent qu'il avait un amant depuis plusieurs années qu'il faut être déçu.
Quand on est rockers et amis, c'est pour la vie.

Dès les premières scènes de "Je suis mort mais j'ai des amis", le ton est donné : le groupe dont il est question est de ceux qui jouent au fond des bars, éclusent des litres de bière et sont soudés comme on l'est rarement. Ceux-là ne rempliront jamais les grandes salles ou les stades, mais resteront authentiques toute la vie, voire même après, puisque c'est le propos du film. Après la mort idiote de leur leader et chanteur, les membres survivants entraînent le spectateur dans une épopée digne des Pieds Nickelés.

Pour filmer cette odyssée faite de bric et de broc, Stéphane et Guillaume Malandrin ont choisi de filmer à hauteur d'homme, au plus près de leurs héros. Malgré un scénario qui paraît parfois improvisé et absurde (mais ce critère est ici hors de propos), on se surprend à accrocher à cette fable rock'n roll, tout sauf sérieuse, mais traitant de sujets profonds. On rit souvent, on est ému également, bref : "Je suis mort mais j'ai des amis" provoque des réactions du côté du myocarde et des zygomatiques. Nombre de films dont le budget paraîtrait pharaonique au regard de celui de ce petit film franco-belge ne peuvent se targuer de produire cet effet.

Mais le plus enthousiasmant dans "Je suis mort mais j'ai des amis" reste sa distribution : qu'il s'agisse du formidable Bouli Lanners, de Wim Willaert (que ce film m'aura permis de découvrir), de Serge Riaboukine (décidément trop rare), de Lyes Salem ou de Jacky Lambert, tous sont épatants de naturel et d'énergie. Souvent, c'est l'élan qu'ils suscitent qui confère de l'intérêt au film. Malgré leurs travers, leurs caractères, on apprend vite à aimer ces personnages, profondément humains et sans doute inspirés par de vrais rockers rencontrés ça et là.

Alors, malgré l'impression de bricolage qu'il laisse souvent, l'énergie et l'humanité de "Je suis mort mais j'ai des amis" sont communicatives, en grande partie grâce à ses interprètes. Enfin, cerise sur le gâteau, la bande originale est à la hauteur (un film qui permet d'entendre les Olivensteins ne peut être forcément mauvais).