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mercredi 12 mai 2021

Le petit locataire (2016)

S'il est un registre cinématographique auquel on peut associer une nationalité, c'est sans doute la comédie sociale, qui me semble attachée au Royaume-Uni. Nombreuses furent les tentatives d'approcher ou d'égaler le talent de Ken Loach ou de Mike Leigh, pour n'en citer que deux, dans ce délicat exercice de style consistant à parler de notre monde sans se moquer de ceux qui tentent d'y survivre. Le cinéma hexagonal s'est frotté plus d'une fois à ce registre, avec plus ou moins de bonheur : de "Normandie Nue" à Bowling", le résultat fut contrasté. Pour autant, les tentatives continuent. Avec Karin Viard en tête d'affiche, "Le petit locataire" a tenté sa chance, sans rencontrer le succès à sa sortie. 

Elle ne s'y attendait pas, Nicole. A 49 ans, alors qu'elle est déjà grand-mère, que sa fille vit toujours chez elle, qu'elle héberge sa mère invalide, et que son mari renâcle à trouver un emploi, elle pensait avoir tourné la page de la maternité. Mais quand son gynécologue lui annonce qu'elle va de nouveau être maman, Nicole prend un sacré coup sur la tête. N'est-il pas trop tard pour elle ?

Il semble évident que "Le petit locataire" ambitionne d'explorer le terrain de la comédie sociale, genre dominé par le cinéma britannique. En plaçant son histoire chez des gens "normaux", voire de la France d'en-bas, Nadège Loiseau semble, dans un premier temps, s'engager sur un terrain souvent mal exploité dans le cinéma francophone. Cette louable ambition ne tient malheureusement pas très longtemps, le film s'orientant rapidement vers la comédie pure, choisissant de concentrer son propos sur l'héroïne et sa famille et délaissant le monde autour. 

Karin Viard, centre de gravité du film, part parfois en roue libre et ajoute au joyeux chaos qu'on ressent parfois au visionnage du "Petit locataire". La famille de guingois qui orbite autour de son personnage comporte pourtant de sacrés personnages (sans doute trop d'ailleurs), du père cherchant sa voie et sa place, à la grand-mère qui s'éteint en douceur, en passant par la fille en mal de maturité. Mais, malgré leur talent, les acteurs peinent à exister face à l'interprète principale. Lors des quelques scènes où ils reprennent la balle, on appréciera d'autant plus leurs prestations. 

S'il comporte quelques jolis moments, "Le petit locataire" n'est cependant pas dépourvu de défauts. En choisissant le registre de la comédie sociale, la réalisatrice oublie néanmoins que les glorieux modèles de ce type de cinéma sont en général porteurs d'une colère, voire d'un message. La situation de départ ne sert ici qu'à générer des situations comiques, mais jamais à donner à réfléchir. La promesse initiale n'est pas tenue et il faut (ou pas) se satisfaire d'un film destinée à faire (seulement) sourire. C'est déjà ça, certes, mais ça aurait pu être tellement plus. 

 


mardi 13 octobre 2020

La séparation (1994)

Christian Vincent, avec son premier film, "La discrète" avait marqué les esprits : inspiré, charmant et élégant, ce long métrage avait mis une grande partie des critiques et du public d'accord. Mais, depuis, ce cinéaste n'a que rarement convaincu et ne rencontra plus l'unanimité. Avec "La séparation", qui voyait Isabelle Huppert donner la réplique à Daniel Auteuil, c'est le versant dramatique de sa filmographie que nous pouvions découvrir. Peu nombreux sont ceux qui se rappellent de ce film : mérite-t-il pour autant cet oubli ?

Anne et Pierre, parents d'un petit Loulou, vivent à Paris. Un soir, au cinéma, Anne refuse de prendre la main de Pierre. Ce geste anodin révèle que quelque chose est cassé dans leur couple. A partir de ce moment, ils vont aller vers la séparation inéluctable. Quand elle annonce à Pierre qu'elle aime un autre homme que lui, il est déjà trop tard et il ne peut qu'assister au naufrage, malgré la colère, malgré la douleur.

Avec un titre pareil et après le résumé que je viens de vous livrer, vous devriez vous douter que "La séparation" est un film dramatique. Les personnages de ce film souffrent et leurs douleurs et leurs tourments nous sont offerts en spectacles. On peut apprécier la démarche, comme il est également possible d'y renâcler. Comparé à certains opus plus récents de Christian Vincent, "La séparation" est bien sombre et dénué de toute légèreté. Cette composante semble uniquement reposer sur le personnage incarné par Jérôme Deschamps, mais ne fait guère le poids face au drame que vivent les deux protagonistes principaux, inéluctable et finalement peu expliqué.  

Le scénario, co-écrit avec le romancier Dan Franck, donne vite l'impression de tourner en rond : le couple formé par les personnages d'Isabelle Huppert et Daniel Auteuil vit un lent naufrage, La désagrégation du couple à l'écran avait sans doute commencé avant le début du film et on assiste, dans "La séparation", à la phase finale du naufrage. Entre résignation et colère, et passant de l'un à l'autre sans raison, l'homme, incarné par un Daniel Auteuil inspiré, peut attirer l'empathie du spectateur, mais aussi agacer. Face à lui, Isabelle Huppert, en femme décidée à quitter le navire, livre également une belle performance. Mais cela ne suffit pas : ce drame ordinaire peine à remplir le film et patine plus souvent qu'à son tour. 

Ce n'est ni la première, ni la dernière fois qu'il faut se réfugier dans la prestation des interprètes d'un film pour lui trouver un peu de charme et d'intérêt. Avec "La séparation", Christian Vincent force -hélas- son spectateur à opter pour ce lot de consolation. 



dimanche 31 mai 2020

Week-ends (2014)


Le cinéma, usant parfois de gros moyens, peut être un grand spectacle, comme il sait parfois se pencher sur quelques petits morceaux de vie ordinaire. Avec "Week-ends", sorti en catimini, Anne Villacèque, réalisatrice de "Riviera", s'était attachée à décrire deux couples amis, en proie aux turbulences sentimentales. Hélas pour ce film, ils furent peu nombreux à aller voir ce film, pourtant encensé par pas mal de critiques. Qui eut tort, qui eut raison ?

Ce qui devait être un énième week-end à la campagne tombe à l'eau, pour Christine. Son mari, Jean, la quitte et ceux qui sont ses amis depuis toujours, Sylvette et Ulrich, s'éloignent d'elle. Leurs maisons de campagne normandes étant voisines, les uns et les autres, il leur est difficile de s'éviter et forcément, les rencontres sont inévitables. 
Rien ne va plus pour Christine, ni les amis, ni les amours. A moins qu'elle ne se trompe...

Voilà ce que certains qualifieront de "petit film", par son budget et aussi son intrigue. D'autres plus taquins, moqueront les "bobos" dont il est question ici, et leurs pseudo-problèmes. On peut facilement adhérer à cette position et le film fait d'ailleurs tout pour qu'on lui trouve des poux dans la tête. Abordant les thèmes universels de l'amour et de l'amitié avec réalisme, "Week-ends" se veut être une comédie dramatique. Cette catégorie, en plus d'être antinomique, est souvent synonyme de fourre-tout, et s'y échouent nombre de films n'ayant pas trouvé leur ton.

En plus de ne trop savoir sur quel pied faire danser son spectateur, "Week-ends" a également une forte tendance à tourner en rond, comme ses protagonistes qui, partant en promenade, reviennent toujours dans leur très chère demeure, sans que rien n'ait changé. C'est vrai qu'il ne se passe pas grand chose, dans "Week-ends", au point qu'on y trouve parfois le temps long, bien que le film ne le soit pas autant qu'il le paraisse.

Le quatuor d'acteurs en "Week-ends", Karin Viard en tête, semble lui aussi tourner en rond et on a du mal à ressentir de la sympathie pour ces personnages enfermés dans leur confort et leurs habitudes. A eux quatre, ils ne parviennent pas à tirer le spectateur de l'ennui. C'est d'autant plus regrettable que ce genre de films a pu donner, par le passé, lieu à de belles prestations et de jolis films.

Un week-end à la campagne, c'est souvent synonyme d'un autre rythme, mais pas forcément d'ennui et de repli sur soi. Enfermant très vite ses personnages sous cloche et se contentant de les regarder, "Week-ends" manque de relief et perd vite en intérêt.


vendredi 5 avril 2019

Voyez comme on danse (2018)




Après une jolie carrière d'acteur, commencée avec ses copains du Splendid et ayant bifurqué vers des horizons inattendus (souvenez-vous de "Tenue de Soirée"), Michel Blanc s'est affirmé en tant que scénariste, dialoguiste et réalisateur. Il a fait bien du chemin, depuis "Marche à  l'ombre" et on se rappelle de "Embrassez qui vous voulez", film choral où le temps des vacances était celui des règlements de compte et des confrontations pour ses personnages hauts en couleur. L'an dernier, Michel Blanc a eu l'idée de donner une suite à ce film plutôt sympathique, avec "Voyez comme on danse". Cette fois-ci, ça a moins bien fonctionné, du moins dans les salles obscures.

Vincent, le mari de Lucie, est persuadé d'être suivi en permanence et devient paranoïaque. Sa maîtresse, Serena, commence à douter de ses promesses. Son fils Alex apprend qu'Eva, sa petite amie de dix-sept ans, est enceinte de lui. Véro, la mère d'Eva, a bien du mal à joindre les deux bouts. De son côté, Elizabeth, la riche amie de Véro et de Lucie, découvre que son mari, Bertrand, a compromis l'entreprise qu'elle possède. 
Dans le petit groupe d'amis, c'est à qui aura le plus de soucis, on dirait...

Si "Embrassez qui vous voulez" était adapté d'un roman de Joseph Connolly, la suite qu'a voulu lui donner Michel Blanc ne fait qu'en reprendre les personnages, du moins une partie de ceux-ci. Exit, pour cet opus, ceux incarnés par Denis Podalydès ou Vincent Elbaz, par exemple. Donc, on prend (presque) les mêmes et on recommence à montrer les défauts des personnages qui, au contact les uns des autres. L'idée est généreuse et pourrait donner quelque chose d'amusant, si l'exercice était autre chose qu'un décalque du premier opus.


Quinze ans plus tard, les personnages de "Embrassez qui vous voudrez" ont vieilli, mais ont finalement assez peu changé. Paradoxalement, si l'on est assez content de les retrouver (pour ceux qui reviennent), la mécanique qui sous-tend le film a moins bien vieilli que ses interprètes. Ce qui fonctionnait avec "Embrassez qui vous voudrez" est plus bancal, quinze années après. Et, surtout, ce qui n'y fonctionnait qu'à moitié ne marche plus du tout.

Heureusement, il y a les acteurs, et particulièrement Carole Bouquet, décidément très à l'aise avec ce que lui sert Michel Blanc, qui illumine chacune des scènes dans lesquelles elle apparaît. J'ai trouvé moins convaincante les prestations, un peu trop poussées, de Jean-Paul Rouve ou de Karin Viard, mais cela relève sans doute d'une sensibilité personnelle. 


On se délectera également de quelques excellentes saillies verbales, nous rappelant le grand talent de dialoguiste de Michel Blanc, qui font toujours mouche, même si certaines scènes semblent être là pour les amener, alors que ce devrait souvent être l'inverse. 

Alors, cette suite était-elle une fausse bonne idée ? S'agit-il d'un demi-échec ou d'une semi-réussite ? A l'instar du verre à moitié plein ou à moitié vide, chacun peut se faire sa propre appréciation, en visionnant ce film. Qui sait si Michel Blanc proposera, dans quelques années, un troisième opus ?


mercredi 23 janvier 2019

Le grand partage (2015)


Quel est le secret d'une comédie ? Pourquoi, des décennies plus tard, "Les aventures de Rabbi Jacob" continue à faire rire en évoquant des sujets graves, alors que "Qu'est-ce qu'on a fait au Bon Dieu ?" finira (je prends les paris) par être oublié ? Telle la potion magique des albums d'Astérix, ces films qui traversent le temps disposent sans doute d'un ingrédient secret. Si vous voulez mon avis, il serait temps de remettre la main sur ce composant, ne serait-ce que pour lutter contre la morosité ambiante.  En voulant traiter d'un sujet grave, à savoir le mal-logement, Alexandra Leclère, dont j'avais déjà peu goûté "Garde alternée", nous a proposé juste avant "Le grand partage"

Il fait froid, cet hiver à Paris, tant et si bien que le gouvernement décide d'imposer à ceux qui ont de la place chez eux d'héberger un ou plusieurs sans-abri. Alors, forcément, dans l'immeuble cossu où cohabitent déjà difficilement la famille Dubreuil (des bourgeois étriqués et peu épanouis) et les Bretzel (des bobos donneurs de leçon qui feraient bien de balayer devant leur porte), ça ne va pas se passer sans mal. Sans compter la concierge, militante d'extrême-droite, qui voit les nouveaux arrivants d'un mauvais œil.


Inutile de tourner autour du pot. Si vous avez vu la bande-annonce (d'ailleurs présente en bas de cet article), les scènes les plus drôles du film s'y trouvent : cela donne une idée de l'ensemble. A l'image de "Garde alternée" et de pas mal d'autres comédies (souvent françaises, il faut le reconnaître), "Le grand partage" donne l'impression qu'il a été produit sur la base de sa situation initiale, sans souci du traitement de celle-ci. C'est bien joli, d'avoir un postulat de base, mais il faut en faire quelque chose et la simple confrontation de personnages et de points de vue différents ne suffit pas forcément à générer les étincelles comiques attendues.

Pour le coup, donc, l'élément perturbateur n'est pas suffisant pour faire tourner le moteur de la comédie. C'est souvent le cas, mais en ce qui concerne "Le grand partage", c'est particulièrement flagrant. Représentatif - hélas ! - d'une grosse partie de la comédie française, ce film se contente du minimum syndical et compte faire rire avec des mécanismes éculés et franchement pas drôles.


On pourra se lamenter de retrouver certains acteurs dans pareil film :  Patrick Chesnais et Karin Viard, par exemple, gâchent leur talent dans ce film. Jackie Berroyer, Michel Wuillermoz, Didier Bourdon et Valérie Bonneton récidiveront dans "Garde Alternée". J'ai tendance à penser qu'ils savent ce qu'ils font et aurais donc peu d'indulgence, pour une fois, pour le casting de cette pantalonnade pataude.

Souvent balourd et jamais drôle, "Le grand partage" porte haut une forme de vulgarité vis-à-vis de ses personnages. Aucun d'entre eux n'est sympathique ni n'attire l'empathie. On peut en dire autant du film.









lundi 6 août 2018

Parlez-moi de vous (2012)



A plusieurs reprises, le cinéma s'est penché sur les hommes et les femmes de radio : on pense évidemment à "Good morning Viet-Nam", à "Un frisson dans la nuit" ou "Good morning England", pour n'en citer que quelques-uns. Il y a quelques années, Karin Viard endossa le rôle d'une animatrice délivrant ses judicieux conseils à son auditoire dans "Parlez-moi de vous". Ce premier film de Pierre Pinaud n'eut qu'un succès limité : c'est tout naturellement qu'il trouve donc sa place dans ces colonnes.
Melina écoute, le soir, les gens qui l'appellent et lui confient leurs problèmes de cœur. Melina leur répond et, lors de son émission radiophonique quotidienne, les aide. Mais, derrière Melina se cache une femme à la dérive. En cherchant à retrouver la mère qui l'abandonna, toute petite, elle découvre un univers bien différent du sien. Melina écoute, mais qui l'écoute, elle ?

C'est du côté de la psychologie de son personnage central, de ses racines et du choc des milieux sociaux que promettait de s'aventurer "Parlez-moi de vous". L'héroïne du film, cachant sa véritable identité et cherchant d'où elle vient, est le pivot de l'histoire qui, hélas, ne tient pas toutes ses promesses. Si, par moments, "Parlez-moi de vous" évoque avec finesse les tourments de ses personnages, il use le plus souvent d'une psychologie un peu épaisse et facile. Le personnage central, Melina, si forte et omnisciente qu'elle soit, ne l'est qu'en apparence. 

Mais c'est évidemment dans le choc de deux mondes différents que se trouve le noyau central du film. Quand l'héroïne met le pied dans l'univers de petites gens,et part à la découverte d'un monde qu'elle connaît mal, sortant au passage de sa zone de confort, le film prend un tout autre tour. L'animatrice se targuant de psychologie devient une femme comme une autre, sans plus fragile qu'elle ne le croit. On peut se dire que le coup de l'émission radio n'était qu'un prétexte comme un autre, finalement, pour suivre un personnage, son parcours, ses découvertes.  

Enfin, s'il est une raison de regarder ce film, c'est évidemment la formidable Karin Viard, qui tient à elle seule toute l'histoire et donne admirablement vie à son héroïne. Derrière elle, les seconds rôles assurent le job, comme on dit, mais l'interprète principale irradie tant de talent qu'elle les occulte parfois. Ainsi Nicolas Duvauchelle, la regrettée Nadia Barentin (à qui est dédié le film) et Catherine Hosmalin, pour ne citer qu'eux, ont parfois du mal à faire exister leurs personnages dans un script qui réserve la part belle à son héroïne.

Sans être tout à fait raté, "Parlez-moi de vous" n'est pas complètement réussi, faute d'un scénario plus solide auquel on aurait pu s'accrocher solidement. Il vaut surtout, vous l'aurez compris, pour la prestation de son actrice principale.



mercredi 1 août 2018

Les enfants (2004)




Les codes ont changé. N'en déplaise à certains, une famille, ce n'est plus seulement une maman et un papa. Nombreuses sont les familles recomposées, même si cette recomposition n'est pas toujours des plus simples.Les films appréhendent peu à peu les nouveaux modèles de famille, mais peu sont nombreux, ceux qui explorent de l'intérieur la reconstruction de la cellule familiale. Christian Vincent, réalisateur de "La discrète" ou de "L'hermine", s'est penché sur l'histoire d'un homme et d'une femme tentant de construire leur vie sur les décombres de leur passé, avec "Les enfants". Il faut croire que le public n'était pas prêt.

Pierre est divorcé et n'accueille ses deux fils, de 9 et 15 ans qu'un week-end sur deux. En quête de l'appartement qui lui conviendrait, il tombe sous le charme de Jeanne, l'agente immobilière en charge de son dossier et elle aussi, divorcée et mère de deux enfants. Après quelque temps de liaison clandestine, Jeanne et Pierre décident de franchir le pas et de vivre ensemble, eux et leur progéniture. Mais mélanger deux fratries n'est pas de tout repos.

En traitant du sujet délicat de la recomposition d'une cellule familiale, Christian Vincent prenait un risque. Soit le traitement partait sur le chemin de la comédie, dont on sait qu'elle peut parfois donner des résultats plus que mitigés lorsqu'il s'agit de parler de faits de société (on pourrait reparler de "Qu'est qu'on a fait au Bon Dieu ?"). Soit, c'est le ton dramatique qui est choisi et le pathos est au coin de la rue, prêt à alourdir le film. C'est entre les deux chemins que le réalisateur s'est engagé, et c'est sans doute la meilleure idée du film, avec celle de rester dans un ton crédible, du début à la fin.

Mais ce choix n'est pas synonyme de réussite totale pour ce film aux jolies intentions. Les maladresses et lourdeurs ne sont pas absentes, hélas. Ainsi, le rôle presque caricatural du fils aîné de Pierre, élément systématiquement perturbateur, déséquilibre le rapport des forces entre les personnages. De même, le personnage de Karin Viard semble vite être le seul moteur du couple en construction, tandis que Gérard Lanvin (remarquable en homme blessé mais qui veut s'offrir une nouvelle vie) se voit contraint de jouer la passivité.

Enfin, la conclusion que se permet le film (et la façon dont elle est traitée, d'un point de vue cinématographique, voix off à l'appui) pourra laisser songeur, voire dubitatif. La dernière impression étant souvent celle qui reste, c'est un arrière-goût peu agréable que laisse finalement "Les enfants". Malgré une intention de départ louable, les nombreuses maladresses du scénario pèsent en défaveur de l'ensemble du film. C'est regrettable, car le sujet traité méritait mieux.










mercredi 14 décembre 2016

L'amour est un crime parfait (2014)



Les romans de Jean-Philippe Djian ont déjà plusieurs fois donné lieu à des adaptations cinématographiques. On pense, bien entendu, au célèbre "37°2 le matin", moins à "Bleu comme l'enfer" d'Yves Boisset ou au récent "Elle" de Paul Verhoeven. Son roman "Incidences" a été adapté par les frères Larrieu (repérés avec "Peindre ou faire l'amour") sous le titre "L'amour est un crime parfait". Ce film avait reçu des critiques mitigées et un accueil public plutôt froid, malgré un joli casting. Méritait-il mieux ?

Professeur de littérature dans la très moderne Université de Lausanne, Marc est ce qu'on appelle un Don Juan et fait des ravages parmi ses étudiantes. Après avoir passé la nuit avec l'une de ses élèves, Barbara, c'est aux côtés de son corps sans vie qu'il se réveille. 
Que s'est-il vraiment passé ? Quel rôle a tenu Marianne, la sœur de Marc, qui entretient une relation fusionnelle avec lui ? Et que cherche vraiment Anna, la belle-mère de Barbara ? Et, au fond, qui est vraiment Marc ?


Avec un pitch pareil, on comprend que certains critiques aient parlé de thriller hitchcockien. C'est cependant sans compter avec le malaise qui planait tout au long des pages du roman de Djian. Pour donner à leur film un ton étonnant, qui peut désarçonner. En utilisant le décor (la présence de la neige, l'architecture), le comportement des personnages, leur rapport aux autres, Jean-Marie et Arnaud Larrieu s'approprient l'oeuvre pour livrer un film étrange, mais finalement bancal. 

Étrange, parce qu'il oscille entre plusieurs genres, du polar au drame psychologique en louchant parfois sur la comédie, parce qu'il ne rend aucun de ses personnages sympathiques et qu'on n'arrive pas à éprouver grand chose pour eux. Bancal, parce qu'à jouer sur plusieurs tableaux, "L'amour est un crime parfait" échoue sur tous. 

Certes, le malaise s'installe, par le comportement des personnages, par leurs décisions, par le jeu volontairement (enfin, j'espère) distancié des acteurs, mais on peine à entrer dans l'intrigue ténue qui tient lieu de colonne vertébrale au film. Il faudrait sans doute se contenter d'observer la faune étrange qui nous est présentée par les frères Larrieu, faune essentiellement féminine, en orbite autour d'un mâle dominant auquel peu résistent. Pour ma part, ce n'est pas à cet exercice d'observation que j'avais choisi de me prêter. 

Alors, finalement assez prétentieux, ce pseudo-polar souvent pénible est à réserver à ceux que le cinéma français, dans ses mauvais jours, ne laisse pas froids. Il doit en rester quelques-uns.


dimanche 21 décembre 2014

On a failli être amies (2014)


Quand, sur l'affiche d'un film, trônent les noms d'Emmanuelle Devos et de Karin Viard, j'ai tendance à me réjouir. Ces deux actrices, dans mon palmarès personnel, sont placées très haut sur l'échelle de l'admiration. Vous comprendrez donc, chères lectrices, chers lecteurs, que je me sois intéressé à "On a failli êtres amies", réalisé par Anne Le Ny, qui avait déjà été remarquée pour "Ceux qui restent" ou "Les invités de mon père". Pour sa dernière réalisation, la réalisatrice n'avait guère déchaîné les foules, malgré des critiques plutôt positives. 

 Marithé est formatrice pour adultes. Parmi ses élèves, majoritairement issus de plans sociaux et de reconversions forcées, se trouve Carole, femme de Sam, un restaurateur très en vue, plein d'énergie. S'attachant peu à peu au cas de Carole, Marithé va vite se rendre compte qu'elle est peu heureuse de son mariage et aspire à une nouvelle vie. De son côté, la formatrice découvre qu'elle est loin d'être insensible à la cuisine de Sam et à son charme.  

Anne Le Ny, actrice souvent remarquée dans des seconds rôles (je songe notamment à sa présence dans "Le goût des autres") est également une réalisatrice à qui l'on doit de jolis films. "Ceux qui restent", par exemple, abordait avec délicatesse un thème grave (la fin de vie et ce qu'il advient de ceux qui restent, comme dit le titre). Son film suivant, "Les invités de mon père", même s'il ne tenait pas toutes ses promesses et perdait en chemin son intérêt, valait encore le visionnage pour ses acteurs. Son dernier opus, "On a failli être amies", confirme hélas le diagnostic précédent. Commençant sur un ton social, il s'aventure sur le délicat chemin des relations amicales, fussent-elles intéressées ou factices, avant de se fourvoyer sur le terrain du vaudeville. 

Alors que l'émotion était palpable sur "Ceux qui restent" (avec, déjà, la délicieuse Emmanuelle Devos), celle qui aurait du alimenter chaque respiration des personnages de "On a failli être amies" est presque évanouie. Devenant vite téléphonée, l'histoire qui nous est contée perd vite tout intérêt, ainsi que (hélas) ses protagonistes. C'est d'autant plus dommageable que les deux interprètes principales donnent l'impression d'être sous-utilisées, endossant le rôle de personnages dont, finalement, on se fiche un peu. La lumineuse Emmanuelle Devos et l'énergique Karin Viard, épaulées par un Roschdy Zem qui réussit à être crédible en orfèvre de la gastronomie, ont beau faire de leur mieux, on ne s'attache pas à leurs destins. 

Il y a de quoi regretter le traitement du sujet. L'amitié entre ces deux femmes, qu'elle soit fondée sur de véritables sentiments ou sur des intérêts plus bas, aurait pu donner lieu à un film intéressant. Ce n'est pas le cas, cette fois. 
On a failli voir un bon film.