Il faudra m'expliquer comment se détermine la diffusion d'un film. Sur quels critères les distributeurs se basent-ils pour décréter que tel film aura droit à une sortie dans un circuit de salles conséquent et que tel autre sera projeté à la sauvette, dans une poignée de cinémas répartis "au petit bonheur la chance" dans l'hexagone ?
Certes, je ne suis pas totalement candide. Le pedigree du réalisateur, le casting qu'il aligne dans son film et le talent du producteur y sont pour beaucoup. N'empêche que, parfois, certains films mériteraient d'être plus exposés qu'ils ne le furent...et d'autres mériteraient moins de tapage, si vous voulez mon avis. La preuve par l'exemple : l'an dernier, après un Festival de Cannes où il fit son petit scandale, Lars Von Trier nous offrit son "Melancholia", fresque intimiste à gros budget dans laquelle une planète jusqu'alors inconnue menaçait la Terre. Je suis persuadé que peu d'entre vous ignorent l'existence de ce film (assez surestimé, à mon goût). Mais qui a entendu parler de "Another Earth", sorti dans une quinzaine de salles en France, et où une planète jumelle de la nôtre apparaît dans le ciel ? Certes, les moyens mis en oeuvre ne sont pas comparables, mais à l'arrivée, je ne suis pas sûr que le meilleur des deux films soit celui que l'on croit.
Farouchement ancré dans le bastion du cinéma indépendant américain, "Another Earth" revendique son appartenance à cette mouvance radicale du septième art. Ici, point d'effets visuels superflus, ni d'interprétation alambiquée : on est dans le cinéma à hauteur d'homme, dans l'hyper-réalisme, et je pense que certaines scènes comportent de l'improvisation. Vous voilà donc prévenus.
Dans "Another Earth", le destin de plusieurs personnages bascule lorsqu'apparaît une deuxième terre. Rhoda, jeune astrophysicienne terminant ses études, percute (en état d'ébriété) la voiture de John Burroughs, compositeur au sommet de sa carrière, tuant sa femme et son fils. Quatre ans plus tard, alors qu'elle sort de prison, Rhoda, brisée et en quête de rachat, s'inscrit pour partir à destination de la deuxième terre, tout en cherchant à retrouver celui dont elle a détruit l'existence.
On pourra reprocher à "Another Earth" sa mise en scène parfois erratique, son côté brouillon, que ces deux traits soient volontaires ou non.Comme s'il voulait à tout prix revendiquer son appartenance au cinéma indépendant américain, le réalisateur Mike Cahill cède aux défauts les plus flagrants de ce genre particulier. Fort heureusement, il emprunte aussi à cette niche du septième art ses plus belles qualités. L'histoire sort des canons traditionnels et ne répond pas à tous les standards scénaristiques en vigueur à Hollywood.
L'interprétation est un des points forts de "Another Earth". Brit Marling, en particulier, illumine le film de sa présence tout au long de l'histoire, bâtie autour de son personnage à fleur de peau. il y a fort à parier que l'on n'a pas fini d'entendre parler de cette jeune actrice prometteuse. Face à elle, William Mapother (essentiellement remarqué dans des séries télévisées) évite l'écueil de l'excès et nous livre une composition toute en nuances.
Face au très médiatisé "Melancholia", "Another Earth" n'a pas à rougir de la comparaison. Là encore, le postulat fantastique n'est qu'un prétexte à une histoire finalement très ordinaire, très humaine.
Un film à découvrir, sans l'ombre d'un doute, si l'on sait passer sous silence ses petits défauts (mineurs).
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