jeudi 17 décembre 2020

Bronx (2020)

 

Signe des temps, "Bronx", le dernier opus d'Olivier Marchal, policier devenu cinéaste et ayant fait sensation avec ses films âpres, souvent désespérés et marqués du sceau de l'authenticité, ne sortira pas en salles. C'est l'omniprésent géant du numérique Netflix qui le propose dans son catalogue déjà bien fourni. Faut-il s'en réjouir ou s'en lamenter ? Le débat est ouvert, mais aujourd'hui, je me pencherai sur une autre question : en n'étant pas projeté dans le circuit "traditionnel" (bientôt désuet, pourrait-on penser), "Bronx" n'est-il pas passé à côté d'un succès public ?

Dans les quartiers nord de Marseille, un règlement de comptes entre gangs fait de nombreuses victimes. Deux équipes sont chargées de l'affaire : la première est menée par Vronski, un officier de l'antigang, tandis qu'en face, la BRB délègue Costa et ses méthodes pour le moins douteuses. Quand un suspect meurt durant sa garde à vue, la situation devient explosive. De chaque côté, les flics vont devoir aller loin, très loin, quitte à piétiner le peu de principes qui leur restait, jusqu'à frôler la ligne fine qui les sépare des gangsters.

Depuis qu'il a fait sensation avec le plutôt réussi "36 quai des orfèvres", qui devait beaucoup au duo d'acteurs qui s'y affrontait (Depardieu et Auteuil, au mieux de leur forme à l'époque), Olivier Marchal s'est imposé comme le cinéaste spécialisé dans les histoires de policiers, portant haut le réalisme, aussi crade soit-il. Ses dernières productions du genre, notamment "Les Lyonnais" et la série "Braquo", continue de tracer le même sillon, allant chaque fois un peu plus loin dans les moyens qu'il donne à ses héros et dans les conséquences qu'il leur fait payer. Autant être clair une fois pour toutes : le happy end, connais pas !

Dans "Bronx", comme souvent, Olivier Marchal pousse donc tous les curseurs au maximum, faisant de ses personnages des êtres désespérés, franchissant les limites et aggravant leur cas chaque fois que c'est possible. Ces choix font sombrer "Bronx" au-delà du réalisme. Sans divulgâcher le film, le film contient nombre de scènes sans grande cohérence (j'ai du mal à croire qu'un détenu en cours de transfert obtienne le droit de faire une visite à l'hôpital au chevet de sa femme mourante...et quelle visite !) et abonde en clichés incongrus (les flics sont tous de gros baraqués roulant dans des automobiles haut-de-gamme). 

Le soleil de Marseille illumine "Bronx" (quartier pourtant pas tout à fait situé sur la Canebière, il me 
semble), quand les précédents opus du réalisateur avaient tendance à privilégier la nuit et la pluie. Ce n'est pas pour autant que l'ambiance est plus légère, au contraire. Ca flingue à tout va, dans "Bronx", et le spectateur n'est jamais épargné. Plus on avance, plus on s'enfonce et seule la violence semble à même de résoudre les problèmes. Cela pose question, du côté de la morale, surtout quand on connaît un peu le bonhomme derrière le réalisateur, soit dit en passant. 

La façon dont Olivier Marchal transforme ses héros en surhommes peut agacer, et c'était déjà le cas (pour moi, en tout cas) sur ce que devenait la série "Braquo". Avec "Bronx", si l'on sent que le réalisateur s'est fait plaisir, tout réalisme semble avoir disparu. Certes, le spectacle est là et "Bronx" est souvent efficace, visuellement parlant, quoique plutôt tape-à-l'œil. Mais, en ce qui concerne le fond, et la crédibilité du scénario, on repassera. 







8 commentaires:

  1. Vu 1 soir ou j'avais rien d'autre sous la main,je plussoie avec ton billet, pas grand chose voire rien à sauver là dedans, Reno et Lanvin font pitié ..
    La scène de l'hosto, clair que là on s'égare :-)

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    1. Cette scène a envoyé, très tôt, ma suspension of disbelief aller pleurer dans un coin...et j'ai été presque gêné pour Reno et Lanvin, sur ce coup-là.
      Merci du passage, Ronnie !

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  2. Je ne le sentais pas et je me suis abstenue de le regarder. Visiblement, c'était la bonne décision ! J'aime bien les trucs musclés et incohérents quand c'est du grand spectacle mais quand on vise un certain réalisme, ça a le don de m'énerver.

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    1. J'ai l'impression qu'Olivier Marchal s'est enfermé dans un style de film et qu'il est condamné à aller plus loin (et, en l'occurrence trop loin) à chaque fois. Une chose est sûre : dorénavant, ce sera sans moi.
      Merci de ton passage, Mel :)

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    1. ...et quand on se targue d'être réaliste, inutile de dire que ça va dans le mur.
      Merci du passage, Selenie

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  4. Des dialogues vulgos, dix mille sous-intrigues au point que tu ne sais plus qui est qui ou avec qui, des acteurs globalement à la ramasse ou en guests de luxe... reste que ce n'est pas très moche à regarder. Mais bon Marchal n'est vraiment que l'homme d'un seul film.

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    1. L'esthétique (trop clinquante à mon goût) ne suffit pas à faire un film. Oublions cet opus, donc.
      Merci d'être passé, Borat...et très bonne année à toi !

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