lundi 30 septembre 2013

Dépression et des potes (2012)


Genre à part entière, le film choral réunit en général une bande d'amis qu'elle soumet à une ou plusieurs épreuves que le groupe traverse avant d'en ressortir renforcé (quand le film se veut drôle) ou dévasté (quand on est dans le domaine du drame). Dans ce registre du cinéma, quelques oeuvres font office de classiques auprès des amateurs : je citerais, par exemple "Mes meilleurs copains" ou "Peter's friends". Dans ces odes à l'amitié, les comédiens sont souvent mis à l'honneur, puisqu'ils incarnent l'essence même du film. "Dépression et des potes", récente comédie dont la promotion fut essentiellement axée sur la présence de Fred Testot dans le rôle principal, n'a pas reçu le succès que ses producteurs espéraient (après le bel accueil public de "L'amour, c'est mieux à deux", qu'ils avaient produit). Fut-ce bien mérité ?


Pendant des vacances de rêves à l'île Maurice, Franck se rend compte qu'il n'est pas heureux. Pourtant, sa petite amie brésilienne est charmante, son métier devrait le passionner, sa vie est comblée. Lors d'une visite médicale, le diagnostic est sans appel : Franck est en pleine dépression. C'est le moment ou jamais de faire appel à ses amis, même s'il ne les a pas vus depuis plusieurs mois. Tout ce petit monde va tenter d'aider Franck, avant de se rendre compte qu'eux tous sont aussi au fond du trou. 

Aux commandes de "Dépression et des potes" (qui pourrait sans doute postuler au César du plus mauvais titre), on retrouve une bonne partie de l'équipe de "L'amour c'est mieux à deux". Si Arnaud Lemort est seul en charge de la réalisation, Dominique Farrugia, l'ex-Nul, continue de produire, tandis qu'une partie du casting est de retour : Jonathan Lambert ou Laurence Arné sont, en effet, de la partie. La tonalité générale du film est, elle aussi, proche de celle de "L'amour c'est mieux à deux" : les vannes fusent et constituent l'essentiel des ressorts comiques du film. En effet, il faut bien reconnaître que la réalisation n'a rien d'exceptionnel et que le scénario ne réserve que peu de surprises, même si ce n'est pas ce que l'on vient chercher dans un long métrage de ce genre.  

Dans son style, "Dépression et des potes" remplit étonnamment bien son contrat. La raison en est simple : le rythme assuré par le scénario et, avant tout, l'énergie et l'humour communicatif de ses interprètes. Se glissant avec un plaisir évident dans la peau de cette bande de potes qui ne vont pas si bien que cela, le quatuor de tête est à saluer bien bas. Fred Testot, par exemple, est bien loin des caricatures qu'il livra pendant des années au SAV de Canal+. A ses côtés, Jonathan Lambert évite lui aussi d'être outrancier et cela lui réussit particulièrement. Arié Elmaleh (revu récemment dans "Les gamins") prouve, pour sa part, et s'il en était besoin, qu'il est bien meilleur comédien que son frère Gad. Enfin, le quatrième de la bande, Ary Abittan, issu également du one-man-show, est surprenant dans le rôle du beau gosse de la troupe. Dans des rôles plus secondaires, mais néanmoins vitaux, les filles de la bande sont, elles aussi, remarquables. 

Ce film n'est sans doute pas une oeuvre majeure ou inoubliable et ne guérira sans doute personne de la dépression, la vraie. Mais le fait est qu'à son visionnage, on sourit souvent et on rit parfois. En ces temps de disette, les amateurs de comédie ne peuvent que s'en réjouir. 


jeudi 26 septembre 2013

Journal d'un corps


S'il est un dessinateur qui a su surprendre son public, c'est bien Manu Larcenet. découvert dans "Fluide Glacial" ou ses barbouillages souvent trash mirent nos zygomatiques à rude épreuve, il asséna aux bédéphiles deux joyaux qui trônent en bonne place chez tous les bobos qui s'assument ("Le retour à la Terre" et "Le combat ordinaire"), avant de livrer le monumental "Blast" (le troisième tome de ce pavé hallucinant est sorti il y a quelques mois). Et je vous épargne les œuvres plus "mineures" (les guillemets ne sont pas superflus) de l'artiste, comme "Chez Francisque" ou "La ligne de front". Surprenant son petit monde une fois de plus, l'ami Larcenet nous a récemment gratifié d'une collaboration avec Daniel Pennac pour la réédition du roman "Journal d'un corps". Edité en 2012, le "Journal d'un corps" a donc fait, cette année, l'objet d'une nouvelle version qui trouvera sa place dans bien des bédéthèques.

L'entreprise est peu commune : narrer, depuis la tendre enfance jusqu'au seuil du tombeau, l'histoire d'un homme sous l'angle exclusif de son corps. A coup de petits bobos, d'émois charnels, de grandes douleurs, sous couvert d'explorer son corps, c'est son âme que caresse le héros de ce journal assez particulier. Traversant le vingtième siècle au rythme de la machine humaine, le lecteur est donc entraîné dans une succession de sensations qu'il a pu déjà éprouver.
Elle est là, la force de ce roman devenu graphique avec l'apport de Manu Larcenet : "Journal d'un corps" parle à tout le monde, parce qu'on  tous connu la maladie, de près ou de loin, ou les bienfaits de l'exercice physique. Sans porter de jugement, se contentant d'observer et de rapporter, Daniel Pennac prête son style et offre là un texte souvent délicieux, jamais rébarbatif et l'on suit sans rechigner les péripéties corporelles que nous offre cet ouvrage, dont on connait pourtant l'issue dès qu'on l'ouvre.
Les dessins de Manu Larcenet prouvent, s'il en était encore besoin, l'immense talent du bonhomme. Il faut définitivement compter cet artiste au nombre de ceux qui comptent dans le neuvième art et dans l'art en général. Certes, il faut être amateur du trait, parfois grossier de prime abord, de Larcenet. Mais, si vous avez aimé "Blast", les illustrations que le dessinateur propose pour ce journal hors du commun sont le complément parfait du texte de Pennac.

On sort de la lecture de ce pavé avec une pointe de tristesse, comme lorsque disparaît quelqu'un qu'on appréciait sans nécessairement le connaître. Avoir côtoyé le narrateur de ce journal dans ce qu'il a de plus intime ne se fait pas sans laisser de traces, ni de souvenirs. En refermant "Journal d'un corps", imposant pavé qui trouvera sa place dans la collection des amateurs de beaux livres, le lecteur peut se sentir comme orphelin. Cette lecture très recommandable à tous, bien ou mal portants, ne devrait donc laisser personne indifférent. 

dimanche 22 septembre 2013

Des nouvelles du Bon Dieu (1995)


Lorsque l'on regarde dans le rétroviseur, on peut trouver beaucoup de charme aux décennies passées. D'un point de vue cinéphilique, les années 1990 furent, pour le septième art hexagonal, une période faste, où quantité de cinéastes prometteurs firent leurs premières armes. Parmi eux, citons les plus connus : Jacques Audiard ("Regarde les hommes tomber"), Matthieu Kassovitz ("Métisse"), Pierre Salvadori ("Cible émouvante"). Il y avait à l'époque (à mon humble avis) beaucoup plus d'audace et de créativité qu'aujourd'hui, où règne en maître le politiquement correct et, bien souvent, la bêtise la plus crasse. Si certains des réalisateurs cités précédemment ont gardé leur indépendance, d'autres ont rangé les armes et sont rentrés dans le rang.

En 1995, Didier Le Pêcheur, après un court métrage remarqué, offrit aux spectateurs un véritable OVNI cinématographique : "Des nouvelles du Bon Dieu". Après avoir remporté le Grand Prix du Festival du film d'humour de Chamrousse (auquel succèdera en 1997 le Festival de l'Alpe d'Huez), le film eut un succès d'estime : comprenez par là que les critiques l'honorèrent, mais que peu de spectateurs firent le déplacement pour aller le voir dans les salles.

Nord et Evangile se posent des questions pour le moins existentielles, depuis le suicide de leur écrivain préféré. Disposons-nous tous de notre libre artbitre ? Et si nous étions finalement des personnages de roman, sortis de l'imaginaire d'un tout puissant littérateur ?
Ne pourraient-ils pas aller voir le romancier qui décide de tout, pour lui demander de leur donner un parcours qui leur sied plus ? Ni une ni deux, bien décidés à tirer tout cela au clair, et si possible, à changer leur vie (puisqu'elle semble écrite), ils vont se tourner vers l'Eglise, quitte à s'en prendre directement au plus proche représentant de Dieu sur Terre : le Pape.

Avec un pitch aussi barré, j'ignore si, aujourd'hui, un producteur se serait risqué à financer un film. C'est donc avec un regard plein de nostalgie (et de regret aussi, parfois) qu'on reverra "Des nouvelles du Bon Dieu". Audacieux, décalé, incisif, voilà pour les qualificatifs pouvant s'appliquer à l'histoire de Nord et Evangile. Au service de cette fable plutôt rock'n roll (scénarisé par le réalisateur avec la collaboration du regretté Artus de Penguern qui fait d'ailleurs une apparition dans le film), une pléiade de comédiens livre une prestation aux petits oignons : c'est avec émotion qu'on retrouve notamment la troublante Marie Trintignant et un Jean Yanne remarquable. A leurs côtés, la trop rare Maria de Medeiros, l'excellent Michel Wuillermoz et le très télégénique Christian Charmetant s'amusent énormément : du coup, le spectateur aussi. Dans des rôles plus secondaires, les plus observateurs remarqueront la présence de Matthieu Kassovitz et de Dany Brillant (oui, vous avez bien lu, le chanteur de charme), et j'en oublie. Rien que pour le casting, le film vaut donc le détour, d'autant plus que ces acteurs sont servis par un scénario plutôt malin et suffisamment irrévérencieux pour qu'on en soit nostalgique (on appréciera les dialogues particulièrement succulents). Enfin, la réalisation, sans déployer des trésors d'inventivité, reste honorable. Que "Des nouvelles du Bon Dieu" n'ait pas plus marqué les mémoires est donc un mystère, voire une injustice.

La carrière de Didier Le Pêcheur fut ensuite sinueuse, puisqu'il se dirigea ensuite vers le film noir, avant d'être "récupéré" par la télévision (notamment pour la série "Malone" ou "No limit"). Devenu artisan au service du petit écran (celui qui gouverne bien souvent aux destinées du grand), ce réalisateur en dit finalement long, par son parcours, sur celui du septième art, qui a souvent bradé sa créativité au profit d'un formatage très en vogue. Dommage que son premier film n'ait pas, en son temps, séduit plus de spectateurs : il aurait pu suivre une toute autre carrière ou (mieux encore) faire des émules.


Ci-dessus la seule bande-annonce de ce film trouvée sur le Net, précédée (hélas) d'intempestive publicité, j'en suis navré !

mercredi 18 septembre 2013

Upside down (2012)


On peut évoquer mille sujets profonds par le biais de la science-fiction, qu'il s'agisse de thèmes de société ou d'angoisses existentielles. Il est plus rare de se servir de cette catégorie d'oeuvre à des fins de romantisme. Le film "Upside Down", avec son univers pour le moins original, tente l'exercice. Son réalisateur, Juan Solanas, en est alors à son deuxième long métrage, après "Air" et un parcours déjà remarqué, notamment en tant que directeur de la photographie. 
Sorti en catimini il y a quelques mois, "Upside Down", malgré la présence au casting de Kirsten Dunst ("Entretien avec un vampire", "Marie-Antoinette") et de Jim Sturgess (vu récemment dans "Cloud Atlas") n'a pas déplacé les foules, loin de là (à peine 40 000 entrées pour l'Hexagone, autant dire une misère). 

Dans le monde d'en-bas, ravagé par la misère et la pollution, vit Adam, un jeune homme que la vie n'a pas épargné. Quand il croise Eden, jeune fille venue du monde d'en-haut, où la richesse et la réussite sont lois, commence une grande histoire d'amour. Malheureusement, les deux mondes, pour proches qu'ils soient, ne peuvent se rencontrer, sous peine de bouleverser leur équilibre. 

La première impression qu'on a, en visionnant "Upside Down" est la bizarrerie de l'univers proposé, et dont les règles de fonctionnement ne sont pas très clairement explicitées, il faut bien le dire. Esthétiquement parlant, le film est de toute beauté et l'on passe vite sur l'incohérence de ces deux planètes qui cohabitent pour se régaler des images offertes, souvent spectaculaires et qui incitent à fermer les yeux sur les effets spéciaux pas toujours du plus haut niveau. L'enthousiasme de ses interprètes (essentiellement Jim Sturgess, qui ne ménage pas sa peine pour incarner ce pauvre Adam) incite également à se laisser entraîner dans le curieux voyage entre ces deux mondes, si proches et si éloignés.

"Upside down", avec son postulat de base hautement symbolique, aurait pu jouer sur le registre social, mais se cantonne dès le début dans une romance, certes agréable, mais moins riche de sens et donc plus anecdotique. Le propos social, voire politique, qui affleure de temps à autre, n'arrive hélas jamais à l'emporter sur la bluette (charmante, mais tout de même superficielle) jouée par les deux principaux interprètes.

Superbe dans sa forme, "Upside down" manque cruellement de fond. C'est d'autant plus frustrant qu'avec ses images superbes, le film est souvent à un cheveu d'être totalement réussi et d’accéder au statut de grand film de science-fiction.





samedi 14 septembre 2013

Monsieur Destinée (1990)


Attention, rareté ! Le film dont il est question aujourd'hui dans ce billet n'a guère marqué les mémoires et bien peu nombreux sont ceux qui en connaissent l'existence. Pourtant doté d'un casting qui aurait du, à son époque, lui assurer une sortie honorable, "Monsieur Destinée" fait partie de ces films sur lesquels on tombe par hasard et dont on n'avait jamais entendu parler. 

Engoncé dans une vie médiocre, Larry vient de passer une journée éprouvante de plus. Bien que ce soit son anniversaire, il a connu moult petits tracas, avant de se faire licencier par un dirigeant malhonnête. Lorsque sa voiture tombe en panne, il pousse la porte d'un bar, dont le serveur lui offre un cocktail étrange. Persuadé que sa vie aurait été radicalement différente s'il avait, à quinze ans, gagné le match de base-ball qu'il perdit, Larry va se retrouver propulsé dans une autre existence : celle où justement, tous les succès lui furent réservés (à commencer par ce fameux match).

Avec un résumé pareil, tout cinéphile devrait immédiatement penser au grand classique "La vie est belle" (celui de Frank Capra). Remake à peine voilé de cet immense monument du cinéma, "Monsieur Destinée" fait partie de ces films utilisant une touche de fantastique. Parmi ceux-ci, il y a de grands films, comme le sus-cité "La vie est belle" ou le plus récent "Un jour sans fin", mais également des tentatives moins réussies. Force est d'avouer que le méconnu "Monsieur Destinée" fait partie du lots des films les plus oubliables.

Du côté de l'interprétation, le bilan de "Monsieur Destinée" est quelque peu contrasté. Si James Belushi  (le frère du regretté John Belushi, inoubliable interprète de Jake Blues dans le cultissime "The Blues Brothers") assure le premier rôle avec efficacité et que Michael Caine livre sans doute la meilleure prestation de tout le casting, on ne peut en dire autant du reste du casting. Linda Hamilton et René Russo (encore débutante), par exemple, sont bien peu inspirées. On notera, de plus, la présence dans des rôles plus accessoires de Courtney Cox, la Monica de "Friends", ou de Jon Lovitz, un habitué des petites lignes des affiches. 

La réalisation extrêmement datée et le montage, totalement bâclé, sont à peine du niveau d'un téléfilm de bas de gamme. James Orr, le metteur en scène, dont c'est ici le premier film, réalisera ensuite "Le maître des lieux" avant de se rabattre sur la télévision, de manière épisodique. Egalement scénariste, l'homme est, il faut le reconnaître, finalement peu doué pour nous raconter une histoire et nous faire vibrer par elle. C'est fort dommage car l'idée de base aurait pu donner un film charmant. En l'occurrence, à coups de gags patauds et d'un manque total de rythme, "Monsieur Destinée" s'enlise rapidement et ne donne finalement qu'un film sans grand intérêt.


mardi 10 septembre 2013

The Jacket (2005)




Certains films connaissent un parcours difficile, qui finit parfois par déboucher sur un heureux épilogue. Pour d'autres, le long chemin de la production ne mène finalement qu'à l'échec et à l'oubli. Dans le cas de "The jacket", on est dans la seconde catégorie. Ce film indépendant, porté à sa génèse par les producteurs George Clooney et Steven Soderbergh, avait été confié à Antoine Fuqua (le réalisateur du récent "La chute de la maison blanche") avant d'échoir au peu connu John Maybury, metteur en scène de "Love is the devil", qui narrait l'histoire du peintre Francis Bacon. Du côté du casting, la tâche ne fut pas aisée non plus. Après avoir envisagé dans le rôle principal, Colin Farrell, puis Mark Walnergh, c'est enfin Adrien Brody qui prit le relais. Lorsque, finalement, "The jacket" finit par sortir en salles, il reçut un accueil des plus frileux et, hormis pour les cinéphiles les plus curieux, sombra dans l'oubli. Cruel destin pour un film : il n'est jamais trop tard réparer un tel oubli, grâce au généreux marché de la vidéo.

Gravement blessé (au point qu'on l'ait cru mort) pendant la guerre du Golfe, et amnésique depuis, Jack Starks est accusé d'un meurtre dont il n'a aucun souvenir. Enfermé en raison de son état mental dans un hôpital psychiatrique de haute sécurité, il va être le sujet d'une terrifiante expérience. Le Docteur Becker, qui dirige l'établissement, va utiliser Jack comme cobaye dans le cadre d'une méthode qu'il a mis au point : corseté dans une camisole de force et enfermé dans un tiroir de morgue, le pauvre aliéné va être la proie de visions venues du passé mais aussi de l'avenir.

Difficile de raconter l'histoire proposée par "The jacket", tant elle mêle les époques avec brio et aussi parce que je me refuse à tout spoiler. Toujours est-il que sur la partition déjà maintes fois jouée du voyage temporel, John Maybury réussit à imposer sa propre tonalité, au point qu'il est difficile de comparer son film à une autre oeuvre déjà connue (à la rigueur, on pourrait évoquer le remarquable "Effet papillon"). Sur ce créneau extrêmement pointu, il est aisé de rater son coup et de sombrer dans le bancal. L'adhésion du spectateur n'est jamais acquise, tant le style ne pardonne guère. Pour que l'exercice soit réussi, il faut un scénario solide, qui rende presque crédible l'histoire contée. Dans le cas de "The jacket", inutile de tourner autour du pot : le script est en béton armé et l'on adhère sans réserve aux événements qui prennent place sur l'écran. Saluons donc bien bas l'équipe en charge de l'histoire et du scénario, mais également le réalisateur, qui réussit à insuffler une ambiance poisseuse, presque vénéneuse à son long métrage. Filmé à hauteur d'homme, s'efforçant de faire de ses personnages des héros ou des salauds, "The jacket" est un film fantastique profondément humain, ce qui joue en faveur de sa crédibilité (un comble pour un film fantastique).

La distribution est, elle aussi, pour beaucoup dans la réussite du film. Tous les acteurs sont remarquables, à commencer par Adrien Brody, qui prouve l'étendue de son registre, après sa prestation du "Pianiste". Derrière lui, qu'il s'agisse de Keira Knightley (qui trouve ici l'un de ses meilleurs rôles), du trop rare Kris Kristofferson, de Jennifer Jason Leigh ou, dans des rôles minces mais marquants, Brad Renfro et du surprenant Daniel Craig (oui, vous avez bien lu, 007 en personne !), tous participent à la réussite de l'entreprise.

Film de genre doté d'une ambiance remarquable, aux personnages incarnés par des acteurs inspirés et doté d'un scénario qui mérite le détour, "The jacket" aurait mérité mieux que le peu de fièvre qu'il déclencha lors de sa sortie. Pour qui aime les histoires plus complexes que la moyenne et les films fantastiques qui ont une véritable identité, "The jacket" fait figure d'incontournable, malgré le peu d'audience qu'il reçut. N'hésitez pas, si l'occasion vous en est donnée, à lui donner une deuxième chance !


vendredi 6 septembre 2013

Homo Disparitus

C'est la petite nouveauté de la rentrée sur ce blog. J'inaugure une nouvelle rubrique, consacrée à des livres récemment lus, qu'ils m'aient plu ou non. 


C'est un essai qui connut un franc succès qui va inaugurer cette nouvelle rubrique du blog. "Homo Disparitus" (en Version Originale "The World without us") d'Alan Weisman a été publié en 2007. L'auteur, journaliste et professeur américain, est parti d'une idée intéressante : si, du jour au lendemain, l'humanité disparaissait de la surface du globe, que deviendrait le monde ? Qu'il s'agisse d'un des conflits dont le genre humain a le secret ou d'un virus particulièrement ravageur qui mettrait tout le monde d'accord, qu'importe finalement le responsable : l'homme a disparu et ne restent de lui sur Terre que ses créations, constructions et déchets divers. Les habitués de ces colonnes noteront qu'on n'est finalement pas trop éloigné du thème de nombreux films de science-fiction post-apocalyptiques récents (on ne se refait pas !).

Une des nombreuses bonnes idées de Weisman, en plus d'admirablement vulgariser son sujet, est d'avoir ancré son sujet dans le concret, à travers des exemples tangibles piochés ça et là sur le globe auprès de spécialistes. Au cours des dix-neuf chapitres de l'ouvrage, le lecteur va visiter Central Park redevenu le marais qu'il était autrefois et se voir expliquer ce que la faune et la flore vont devenir, une fois l'homo sapiens sapiens évanoui, regarder son pavillon de banlieue d'un autre oeil en envisageant ce qu'il deviendrait sous le coup de boutoir des années, frémir à la simple évocation des déchets radioactifs enfouis ça et là ou rêver à l'idée de la sonde Voyager (finalement l'une des seuls créations humaines qui subsisteraient). Quand passeraient les années, les siècles, les millénaires, peu à peu disparaîtraient bon nombre de choses que nous pensions pourtant amenées à durer éternellement. 

L'essai scientifique est traditionnellement peu abordable, parce que destiné avant tout aux scientifiques, justement. Fort de son expérience de journaliste (spécialisé dans l'environnement), Alan Weisman utilise tout au long de "Homo disparitus") un langage accessible à tous et son style fait du livre un ouvrage totalement digeste et souvent passionnant. Pour qui s'intéresse à l'environnement, "Homo disparitus" fait donc figure d'incontournable. A mes yeux, il s'agit d'une lecture indispensable, même si, remettant l'homme à sa place et (surtout) lui mettant devant les yeux les conséquences de ses activités, ce livre peut coller quelques sueurs froides. Je songe notamment au fameux "septième continent" et aux ravages causés par l'industrie du plastique sur les océans de notre bonne vieille planète bleue, ou aux contenus soi-disant totalement sécurisés des sites de stockage des déchets radioactifs. 

Au chapitre des bonus, je ne saurais trop vous recommander la visite du site consacré à l'ouvrage (en anglais, mais abordable par tous). Si vous souhaitez vous faire une idée du contenu, un extrait est disponible ici. Les vidéos ci-dessous peuvent vous donner une idée de ce qui attend la planète ou, à une échelle qui parlera à tout le monde, une simple maison, une fois l'homme disparu. Brrrr !




lundi 2 septembre 2013

Mariage à l'anglaise (2012)



Il va falloir m'expliquer comment les distributeurs d'un film décident du titre qu'il portera dans tel ou tel pays. Ce n'est pas la première fois que je constate l’imbécillité d'une traduction dans ces colonnes, mais le cas de "Mariage à l'anglaise" est typique d'un certain mépris du public. Son titre original, "I give it a year" (c'est-à-dire "Je leur donne un an", grosso modo) reflète beaucoup mieux l'idée principale du film, à savoir la longévité d'un mariage à laquelle personne ne croit et dont tous les invités se demandent s'il tiendra effectivement un an. Au lieu de cela, sans doute dans l'espoir d'attirer un peu plus les spectateurs (souvent des spectatrices, dans ce registre, d'ailleurs), les producteurs ont cru bon de le rebaptiser "Mariage à l'anglaise" et de choisir pour ce film une affiche fort différente de l'originale. On aurait donc pu croire, vu de l'hexagone, être en présence d'une comédie romantique pur jus. Il faut croire que le public ne s'est pas laissé prendre, malgré la présence de Simon Baker, la star de la série "Mentalist", puisque (tout au moins en France) "Mariage à l'anglaise" fut un bide sévère. Reste à savoir si cela servira de leçon aux distributeurs : rien n'est moins sûr.

Nat et Josh se sont rencontrés à une soirée, ont craqué l'un pour l'autre, se sont mis en couple et ont décidé de se passer la bague au doigt, malgré leurs différences et malgré ce qu'ils ignorent l'un de l'autre. Alors que tous ceux qui les entourent doutent de la pérennité de leur union, Nat et Josh continuent à croire en leur idylle, malgré la présence de Chloe, l'ex-petite amie de Josh et celle de Guy, client de l'agence que dirige Nat et "beau gosse de compétition".
Alors que les pressions se multiplient, et que le bel édifice de leur mariage vacille, Nat et Josh tiendront-ils le coup ou devront-ils se résoudre au funeste destin que beaucoup voient réservé à leur couple ?

A lire le résumé que je viens de vous livrer, on pourrait imaginer que "Mariage à l'anglaise" est une comédie romantique "à l'envers", dans laquelle le couple vedette est déjà marié et doit traverser des épreuves pour le rester. On pourrait avoir eu droit à un traitement dramatique plombant le film (spécialité de bien des films français) ou, et c'est en partie le cas ici, une approche sur le ton de la comédie, parfois outrancière (telle qu'on peut y avoir droit dans nombre de comédies américaines du moment).

Le réalisateur de "Mariage à l'anglaise", Dan Mazer, a auparavant travaillé avec Sacha Baron Cohen, à qui l'on doit l'extravagant personnage de Borat, par exemple.Ces références en disent long sur ce que peut donner le bonhomme, une fois lancé à plein régime. Certaines scènes frôlent d'ailleurs le "trash", bien loin du ton qu'on pouvait attendre au vu de l'affiche. Entre humour parfois vulgaire et une vraie mélancolie, "Mariage à l'anglaise" réussit cependant à faire rire, malgré quelques séquences dont on se serait volontiers passé, parce qu'elles sont trop longues ou répétitives (celle du plan à trois où se retrouve Chloe, par exemple).

Du côté de l'interprétation, rien à redire : le quatuor de tête est remarquable et est épaulé par des seconds rôles qui font mouche (Stephen Merchant, par exemple, est presque inquiétant dans son rôle d'ami de Josh). Les héros, avec leurs (nombreux) travers, sont attachants et crédibles, et l'on s'attache d'autant plus à eux.

Avec moins de déséquilibre entre les séquences humoristiques et celles plus romantiques, mais surtout en ayant été promu avec une réelle honnêteté de la part de ses distributeurs, "Mariage à l'anglaise" (qui n'est finalement pas une comédie si romantique) aurait sans doute pu toucher un public plus large. Sans être la comédie romantique trash qui fera date, ce film aurait mérité mieux que son traitement.