En 1969, le Festival de Woodstock, qui aurait pu tourner à la catastrophe, est entré dans la légende et reste sans doute LE festival ayant le plus marqué les esprits. Durant trois jours, un petit village américain vit se réunir des centaines de milliers de jeunes, venus là célébrer la musique, la paix et l'amour. Ang Lee, réalisateur hétéroclite, à qui l'on doit des films aussi divers que "Raisons et sentiments" que "Hulk" ou "Le secret de Brokeback Mountain", nous offrit en 2009 un film passé sous pas mal de radars, narrant les dessous de ce festival.
1969 : alors qu'il aide ses parents, criblés de dettes, à maintenir à flot le motel familial, au lieu de se consacrer à sa carrière de décorateur, Elliot apprend qu'une bourgade voisine a finalement refusé d'accueillir un festival de musique hippie. Comme il assume également le rôle de président de la chambre de commerce, il saute sur l'occasion et contacte les producteurs, avant de convaincre le voisin de louer son champ pour ce festival. Quand plus de 500 000 personnes arrivent sur les lieux de ce qui va devenir un événement historique, Elliot réalise que plus rien ne sera comme avant.
Si les premières séquences sont quelque peu laborieuses et que l'histoire peine à démarrer, une fois l'introduction passée, il est difficile de nier la réussite de "Hôtel Woodstock". Racontant avec talent ces jours de fête et de paix, tandis que l'Amérique s'embourbait au Viet-Nâm, Ang Lee adapte le roman biographique d'Elliot Tiber, nous offrant une plongée dans une époque qui semble bien éloignée de la nôtre. Et ce voyage en utopie est un beau périple, en grande partie grâce à sa réalisation, à échelle humaine, avec juste ce qu'il faut de naïveté et énormément d'amour pour les personnages de cette belle histoire.
La distribution est à l'avenant : Demetri Martin, dans le rôle principal, est remarquable et ceux qui l'entourent donnent vie de belle manière aux protagonistes, pour le moins typés, de cette rencontre inattendue entre deux mondes. Qu'il s'agisse de Liev Schreiber, inattendu en agent de l'ordre travesti, d'Emile Hirsch, en soldat traumatisé par le Viet-Nâm, ou des excellents Henry Goodman ou Imelda Staunton, (et j'en oublie), tous les interprètes sont dans le ton du film, à la fois cool et humain.
C'est avec une belle maestria qu'Ang Lee (dont le "Hulk" avait pu décevoir) orchestre ce choc des civilisations, utilisant même le découpage d'écrans qu'on peut retrouver dans le documentaire "officiel" consacré au Festival de Woodstock. On y verra là un hommage, dont l'efficacité s'avère redoutable en termes d'immersion dans ces jours de fête mémorables.
Même si l'on ne voit aucune image de concert (alors qu'Ang Lee aurait pu allègrement piocher dans les archives), l'ambiance de ces jours uniques est omniprésente dans le film. Empli de bienveillance, "Hôtel Woodstock" réussit à insuffler une véritable nostalgie pour la parenthèse enchantée que fut ce festival.