vendredi 30 janvier 2015

Le premier cercle (2009)


Les familles criminelles sont un thème récurrent du cinéma. On ne compte plus les films explorant les dynasties maffieuses, réussis ou non. Qu'il s'agisse de l'incontournable « Parrain », du « Grand pardon » ou du « Clan des Siciliens », évoquer ces clans vivant de sombres trafics et de la mort est presque devenu un genre à part entière. Mais l'exercice de style est périlleux et ceux qui s'y sont cassé les dents sont légion. Laurent Tuel, déjà remarqué avec la comédie "Jean-Philippe" (avec Fabrice Luchini et Johnny Halliday), pourrait en témoigner : son "Premier Cercle" lui valut un échec cuisant en salles. 

Cette fois-ci la famille est arménienne et se nomme Malakian. Milo, le père règne sur son clan, tout en se préparant à quitter les affaires, pour les laisser aux mains de son fils, Anton. Seulement, celui-ci aimerait bien rompre la tradition familiale et ne demande pas mieux que de se ranger des voitures. Depuis qu'il est tombé amoureux d'Elodie, jolie infirmière, il n'aspire plus qu'à une chose : sortir du cercle criminel dans lequel il évolue depuis sa naissance. Le braquage ambitieux que prépare Milo sera donc son dernier fait d'armes, et l'occasion pour le père et le fils de régler leurs comptes.

Comme l'indique le résumé que je viens d'en faire, les thèmes convoqués par "Le premier cercle" font partie des grands classiques du cinéma. Hélas, on peut, pour ce film, parler de clichés, enfilés les uns derrière les autres comme des perles. Outrancièrement prévisible, le scénario est particulièrement pauvre en surprises, accumulant les sensations de déjà-vu (et revu). Sur le fond, donc, rien de neuf, sous le soleil. Et ce dernier est particulièrement présent dans ce long-métrage. Il faut croire que "Le premier cercle" a été tourné par très beau temps. Ou alors qu'il y avait un stock de filtres jaunes dont Jean-Pierre Jeunet voulait se débarrasser. Toujours est-il que la lumière baignant presque chaque plan du film, en plus d'être très artificielle, nuit au réalisme de l'ensemble. L'image est léchée, certes, mais elle n'a pas l'impact qu'aurait pu lui donner une photographie plus sale et une réalisation plus nerveuse.
Circonstance aggravante : le casting ne fonctionne pas. Qu'il s'agisse de Jean Reno, monolithique et visiblement peu convaincu par son rôle de patriarche, de Gaspard Ulliel, laissé à lui-même et versant dans l'excès, de Sami Bouajila, à peine crédible en flic tenace, malgré l'énergie qu'il déploie, ou de Vahina Giocante, réduite au rôle de faire-valoir, les acteurs du "Premier cercle" semblent emprisonnés dans leurs personnages et les clichés qu'ils véhiculent.

Enfin, la bande originale, totalement inappropriée (les envolées lyriques au piano auraient parfaitement convenu à une romance ou une tragédie, mais sonnent totalement faux ici) parachève le tableau. A ne pas croire totalement en l'histoire qu'ils veulent nous raconter, les artisans du "Premier cercle" ne font jamais adhérer le spectateur à celle-ci. Les familles qui ont précédé le clan Malakian ont encore de beaux jours devant elles...


dimanche 25 janvier 2015

Open Windows (2014)


Je l'évoquais récemment : nous vivons dans un monde hyper-connecté, pour le pire et le le meilleur. Fatalement, le cinéma s'empare de ce thème, parce qu'il est dans l'air du temps, parce que notre art préféré est sans doute le plus adapté pour l'évoquer. "Open Windows", première du réalisateur espagnol Nacho Vigalondo en territoire hollywoodien, a choisi d'aborder ce thème et d'en faire un thriller à la fois technologique et basé sur la fascination. Malgré la présence au casting d'Elijah Wood et de Sasha Grey, ce film a atterri, dans nos contrées, directement au rayon direct-to-video.

Webmestre d'un site consacré à l'actrice Jill Goddard, Nick Chambers a gagné un dîner avec son idole et se prépare à cette belle soirée, tandis que la vedette présente son prochain film à l'occasion d'une conférence. C'est alors qu'un mystérieux individu contacte Nick : Jill Goddard a annulé le rendez-vous. Qu'à cela ne tienne, l'inconnu propose au jeune homme d'espionner l'actrice, via son téléphone portable. Nick accepte, sans savoir où va l'entraîner cette histoire.

Entièrement basé sur les écrans au point que toutes ses images sont filmées et retranscrites comme sur ceux des téléphones portables et des écrans, "Open Windows" portait, dans son idée de base, une promesse : évoquer la fascination et les dangers de l'hyper-connexion. Passée l'introduction, on est fixé sur l'entreprise : c'est un échec, ni plus ni moins. Prouvant une fois de plus qu'une idée de base, aussi originale soit-elle, ne fait pas un film, Nacho Vigalondo s'empêtre tout seul dans une intrigue tarabiscotée et vite incompréhensible et sans intérêt. Premier film "hollywoodien" de son réalisateur (remarqué avec "Timecrimes"), « Open Windows » tente d'imposer sa forme, mais ne dispose pas du fond nécessaire à son ambition. Torpillé par un scénario cachant ses failles derrière une complexité artificielle, "Open Windows" donne vite envie au spectateur de laisser tomber le visionnage, devant l'histoire invraisemblable qu'on nous conte là.

On peut se poser maintes questions quant au casting de ce film. Elijah Wood, dont la carrière semble prendre de plus en plus l'eau, ces dernières années, aurait-il laissé derrière lui ses meilleurs rôles. Celui qui incarna avec tant de talent le Frodon du « Seigneur des Anneaux » semble piégé dans un film auquel il ne comprend pas grand-chose, comme le spectateur, d'ailleurs. Face à lui, Sasha Grey, ex-star du cinéma pornographique, prouve qu'il y a bien du chemin entre son ancien domaine de prédilection et le statut d'actrice, tant elle est fade, parce que sans doute guère convaincue du jeu auquel on veut la faire jouer. 

Cependant, comme je l'ai déjà dit, le plus grand coupable de cette entreprise reste le scénario, qu'on aurait pu croire basé sur la fascination et l'image, mais n'est qu'un énième thriller à multiples retournements de situations, tous moins crédibles les uns que les autres. Échouant à convaincre le spectateur, "Open Windows" devient vite lassant, à cause de sa forme, en plus d'être sans intérêt sur le fond. Il est des fenêtres qu'il vaut mieux laisser fermées...



mardi 20 janvier 2015

Trois amis (2006)



L'amitié a maintes fois inspiré les scénaristes, de "Mes meilleurs copains" aux "Petits mouchoirs", en passant par "Comme des frères" ou "Peter's friends", pour ne citer qu'eux. Cette alchimie étrange qui fait que certains individus tissent des liens plus étroits que des frères et sœurs n'a pas fini d'alimenter les fictions. Michel Boujenah, qu'on ne présente plus au regard de son immense carrière sur les planches et au cinéma, a voulu brosser un tableau en l'honneur de ce grand et noble sentiment, avec "Trois amis", sa deuxième (et dernière) réalisation, après "Père et fils". Las, "Trois amis" n'eut guère de succès et hante désormais les grilles de la TNT.

Jeunes quadragénaires, Claire, Baptiste et César sont amis depuis toujours. Certes, leur amitié connaît des hauts et des bas, certes, leurs histoires de cœur et leurs passés respectifs viennent parfois fendiller le ciment qui les unit. Ils se disputent, se réconcilient, se perdent de vue et se retrouvent, comme tous les amis, malgré leurs différences, leurs caractères, malgré la vie qui les malmène.

En réalisant "Trois amis", Michel Boujenah tentait, à en croire le pitch, de répondre à des questions majeures : qu'est-ce qu'un ami ? Jusqu'où peut-on aller par amitié ? Il revendiquait même l'influence de Claude Sautet pour la construction de ses personnages. Il faut croire qu'il pécha par excès d'ambition, si l'on se fie au simple ressenti post-visionnage. Autrement dit, l'ami Boujenah a eu les yeux plus gros que le ventre. A défaut d'épaisseur et de sens, il nous livre ici un film au scénario semblant écrit au fil du tournage, sans cohérence ni véritable colonne vertébrale. La réalisation mollassonne  n'arrivant pas à faire illusion, les nombreuses faiblesses de l'histoire sont prises de plein fouet par le spectateur qui, du coup, n'adhère pas et ne peut s'attacher aux personnages.

Du côté de l'interprétation, c'est bien décevant : Kad Merad fait son numéro habituel, face à un Pascal Elbé qui réalise sans doute la meilleure des performances du film (ce qui n'était pas difficile). Mathile Seigner, égale à elle-même, agacera ceux qui ne la supportent pas (dont je suis). On pourra, à la limite, se consoler grâce aux seconds rôles, avec un Yves Rénier inattendu et surtout les scénes émouvantes où apparaît le regretté Philippe Noiret, dans son dernier rôle (et visiblement déjà très malade). 

Michel Boujenah a raté son coup, avec "Trois amis". Pensant sans doute célébrer l'amitié, il se
contente d'un film au scénario plus bricolé qu'écrit, accumulant les scènes incongrues et n'étant que très rarement drôle. On est sensé passer un bon moment entre amis. Il faut croire que ceux-là n'en sont pas de vrais.


jeudi 15 janvier 2015

Men, Women and Children (2014)


L'émergence d'Internet a bouleversé notre quotidien en quelques années. Elle a permis le pire, mais aussi le meilleur. Quoi qu'il en soit, notre époque est placé sous le signe de l'hyper-connexion, tout le monde sachant instantanément ou presque tout sur tout le monde. Face à cette révolution, les comportements peuvent varier du tout au tout, de la méfiance à l'adhésion totale. Jason Reitman, fils d'Ivan Reitman, le réalisateur de "S.O.S. Fantômes" ou "Jumeaux", s'est fait remarquer avec le très sympathique "Juno" (qui révéla Ellen Page, au passage). Son film suivant, "In the air", mettait en avant un George Clooney inattendu en prestataire se chargeant du sale boulot chez ses employeurs. L'an dernier, est sorti son dernier film, "Men, Women and Children", qui traçait le portrait d'une société hyper-connectée. Bien que traitant d'un sujet ô combien dans son époque, il n'a pas eu le succès attendu, en France, en tout cas.

Une petite ville américaine comme tant d'autres : au lycée, les élèves sont accaparés par leur smartphones et basent toute leur vie sociale sur les textos échangés, sur les images reçues via les écrans. Leurs parents, quant à eux, ont différentes approches : certains épousent cette drôle d'époque, d'autres jouent les censeurs. Mais, qu'en est-il des vraies relations humaines ? Qu'il s'agisse de couples à la dérive ou d'amours adolescentes, la réalité et les réseaux sociaux s'entrecroisent, parfois avec douleur, parfois plus heureusement. Le monde a changé, et avec lui les rapports humains.

Encore une fois, Jason Reitman a choisi un sujet très ancré dans notre époque. Il aurait pu s'y casser les dents, comme bien d'autres réalisateurs, s'il l'avait attaqué de front. La bonne idée qu'il a eu consiste en une vue en coupe de notre époque, par le biais de plusieurs cellules familiales, représentatives du temps, chacune l'abordant à sa manière. On trouve dans ce film un couple qui a cessé de se parler et de faire l'amour, une lycéenne obsédée par le contrôle de son corps, un fils que son père ne comprend plus, une mère abusant du contrôle auprès de sa fille, et j'en passe. Au centre de ce réseau humain, les réseaux dits sociaux jouent un rôle déterminant, mais Jason Reitman réussit, tout en les utilisant comme système circulatoire, à donner corps aux multiples histoires sans les rendre anecdotiques. Usant du savoir-faire qu'on avait déjà décelé dans "Juno", le réalisateur confirme toute l'estime qu'il avait suscité. Malgré quelques petites longueurs qui nuisent au rythme de l'ensemble, le film décline la relation humaine sous bien des angles, jusque dans l'intime, quitte à emprunter les moyens un peu "crus" qu'on croyait réservés à la comédie lourdingue en vogue ces derniers temps.

Un tel film ne serait rien sans des personnages dignes de ce nom. Les amoureux des acteurs seront ici comblés. On saluera la magistrale interprétation de tout le casting de "Men, Women and Children". Qu'il s'agisse des plus jeunes ou des poids lourds de l'affiche, tous les acteurs donnent le meilleur d'eux-mêmes. Adam Sandler et Jennifer Garner ont rarement été aussi persuasifs, tandis que la jeune génération (Ansel Elgort et Kaitlyn Devert en tête) fait montre d'un talent prometteur. Donnant vie aux personnages de ces histoires qui s'entrecroisent, qu'ils soient des poids lourds du box-office, des habitués du cinéma indépendant ou de jeunes pousses en devenir, tous sont absolument impeccables de justesse.

Certes, "Men, Women and Children" comporte quelques longueurs et quelques lourdeurs dans son propos, mais il a l'immense mérite de regarder notre époque en face, avec tous les travers qu'elle cultive. Plus efficace à mes yeux que les opus déclinés sous l'égide de Judd Apatow et consorts, Jason Reitman affirme une fois de plus son talent de conteur d'histoires ordinaires, ancrées dans leur temps et livre un film qui mérite d'être vu.


samedi 10 janvier 2015

Zero Theorem (2013)


Un film de Terry Gilliam est toujours un événement, et souvent un bide, hélas. L'ancien Monty Python est évidemment associé à son projet maudit "Don Quichotte", mais aussi aux échecs (pas forcément mérités) de "Tideland" ou des "Aventures du Baron de Münchausen", par exemple, au point qu'on en oublie souvent certains de ses films, dont le cultissime "Brazil". Son dernier en date, "Zero Theorem", revendiqué comme dernier volet de sa trilogie orwellienne, après le déjà cité "Brazil" et "L'armée des douze singes", est récemment sorti en DVD, après une carrière dans les salles particulièrement désastreuse.

Londres, dans un futur plus ou moins proche. Qohen Leth ne sort de chez lui que pour aller travailler, au service de l'énigmatique Management et à la résolution du non moins étrange Théorème Zéro, sensé déterminer le sens de la vie. Déjà pas mal perturbé dans son psychisme, Qohen est sans cesse dérangé par le monde extérieur, extrêmement agité et bruyant, par son supérieur hiérarchique, par sa voisine excentrique et le fils de Management.

Au visionnage de "Zero Theorem", on peut rester perplexe. Le bouillonnant Terry Gilliam, qui dérouta plus d'une fois son public, semble ici s'être totalement affranchi des contraintes pour livrer un objet filmique assez déroutant. Construit autour du personnage de Qohen Leth, ou plus exactement autour de la prestation de Christoph Waltz, "Zero Theorem" convoque l'imagerie orwellienne et foutraque de "Brazil" pour décrire un monde truffé de caméras et d'écrans, de spots publicitaires et d'entreprises aux desseins obscurs. Dans l'ancien monastère servant de logement à Qohen Leth, vont et viennent toutes sortes de protagonistes, chacun jouant son sketch avant de repartir, laissant le pauvre homme épuisé et pantois, à l'instar du spectateur.

Maelström d'images souvent répétitives, de gags tombant souvent à plat, "Zero Theorem" manque cruellement d'une colonne vertébrale, d'une structure solide, d'un scénario digne de ce nom. Terry Gilliam s'est visiblement contenté de filmer les gesticulations de Christoph Waltz (aux limites de son art), l'excentricité enfin assumée de la ravissante Mélanie Thierry, les apparitions du sous-employé David Thewlis, sans cependant raconter une histoire digne de ce nom à son spectateur.

Conclusion d'une trilogie orwellienne que l'on n'avait pas forcément intégré (si la parenté avec "Brazil" saute aux yeux, celle avec "L'armée des douze singes" est moins évidente), ce "Zero Theorem" donne, tout au long de son déroulement, l'impression d'être un patchwork hétéroclite, proche de ce qui doit se passer sous le crâne de son géniteur. Brouillon au point d'être presque illisible, ce film, majoritairement décrié, doit donc être vu comme un kaléidoscope exprimant les angoisses de son créateur, mais pas comme un film accessible à tout un chacun, qui raconterait une histoire digne de ce nom. On pourra, au choix, se réjouir qu'un réalisateur comme Terry Gilliam puisse accoucher d'une oeuvre si peu commune, ou se lamenter qu'il livre un tel foutoir. 







mardi 6 janvier 2015

Une nouvelle vie pour Marius, Fanny et César !


L'année 2015 marque les 120 ans de la naissance de Marcel Pagnol et du cinéma, mais également le 60e anniversaire de la présidence du cinéaste au Festival de Cannes.
A cette occasion, Nicolas Pagnol, petit-fils de Marcel Pagnol, a lancé une campagne de crowdfunding sur la plateforme Ulule pour financer la restauration de la trilogie marseillaise Marius, Fanny, César, de Marcel Pagnol. Nous devons nous mobiliser pour participer massivement à la collecte sur ulule.com/pagnol et permettre de récolter 50.000€ pour chacun des films. Une restauration patrimoniale à partir du négatif d'origine ainsi qu'une restauration numérique permettra à ces trois films d'être à nouveau projetés dans les salles de cinéma.
La campagne a déjà démarré fort, mais le projet a besoin du soutien du plus grand nombre pour se réaliser ! 
Vous pouvez faire partie de l’aventure en préachetant votre DVD des films de la trilogie en version restaurée, des tirages photos des tournages, des invitations pour les évènements de l'année Pagnol, etc. sur ulule.com/pagnol

lundi 5 janvier 2015

Plan de table (2011)



On a tous nos moments de faiblesse. Malgré les nombreuses déceptions qu'elle a causé chez moi, je reviens régulièrement vers la comédie française, espérant que, dans le nombre de films produits sous sa bannière, se trouve une pépite qui m'aurait échappé à sa sortie. Il n'y a pas si longtemps, fut diffusé (sur je ne sais plus quelle chaîne de la TNT) le film "Plan de table", dont je n'avais pas entendu parler lors de sa sortie : son résultat au box-office fut en effet désastreux. Il bénéficia donc du doute et le voici maintenant traité dans ces colonnes.

Pour une fois, tout commence par un mariage, à ceci près que la mariée et son ex s'offrent un dernier moment intense sur la table dressée pour la fête. Le plan de table, bouleversé par leurs ébats, est reconstitué à la va-vite par l'amant. Et, ce faisant, l'homme modifie le destin des convives.
Qu'à cela ne tienne, grâce à plusieurs retours en arrière, il aura l'occasion de corriger le tir, encore et encore.

Le postulat de base du film, s'il louche fortement vers celui du merveilleux "Un jour sans fin", aurait pu être à la base d'une comédie sympathique, voire audacieuse. Après tout, les anglo-saxons n'ont pas le monopole de la comédie (romantique ou pas). Utiliser comme point d'ancrage le grand jour du mariage était également une bonne idée, a priori. Hélas, et pour faire cesser tout suspense, la mécanique ne fonctionne tout simplement pas, dans le cas de "Plan de table". Et j'ai la très nette impression que ce qui cause pareille impression, c'est le scénario, particulièrement déséquilibré.

Allant et venant entre ses personnages, sans prendre le temps de les enraciner dans l'histoire, le scénario en fait des caricatures plus que des protagonistes à part entière. Entre un médecin infidèle interprété par l'agaçant Franck Dubosc, sa nunuche de femme (pauvre Elsa Zylberstein) et une mariée sans épaisseur (Louise Monot, transparente), les invités de ce mariage ne sont que peu crédibles. 
Alors qu'ils devraient être les composants essentiels de pareil exercice de style, ils contribuent au naufrage. Facteur aggravant, les acteurs sont, il faut le reconnaître, plutôt mauvais, la palme revenant à l'exaspérante Audrey Lamy, suivie de peu par Shirley Bousquet (décidément bien mal inspirée dans ses choix), en femme de galeriste alternant entre nymphomanie et désir d'enfant. 

Au bout d'un moment, le spectateur peut se lasser des gesticulations des personnages et renoncer à participer au jeu qui consiste à bouleverser le destin. Loin du célèbre effet-papillon, le pachydermique jeu de dominos mis en scène par Christelle Raynal (également co-scénariste et qui a un petit rôle dans le film) s'avère une pâle déclinaison d'un exercice de style qu'on a vu cent fois plus réussi par ailleurs. On retiendra de "Plan de table" deux leçons (qui, à bien y réfléchir, tombent sous le sens) : ne pas se risquer sur des territoires déjà balisés par d'autres plus talentueux et ne pas inviter son ex à son mariage.