dimanche 30 octobre 2016

Un monde meilleur (2000)


Une oeuvre peut-elle changer le monde ? Ou, au moins, instiller une idée qui ferait de notre planète un monde meilleur ? Il est permis d'en douter. Néanmoins, il est quelques films qui, par les thèmes qu'ils évoquent et les actions qu'ils suggèrent, pourraient prétendre à cela. Le roman "Pay it forward", de Catherine Ryan Hyde, adapté sous le même titre au cinéma par Mimi Leder (et dont le titre français était "Un monde meilleur") m'avait, lors de sa sortie, laissé un joli souvenir. Il ne changea pas le monde, cependant, ni ne marqua les mémoires, malgré une belle ambition.

Dans la banlieue de Las Vegas, le jeune Trevor découvre son nouveau professeur de civilisation. Celui-ci, un homme mystérieux au visage partiellement brûlé, donne à ses élèves un étrange devoir : trouver une idée qui rendrait le monde meilleur. 
Ce jeune garçon, dont la mère célibataire tente de survivre entre petits boulots et alcoolisme, va prendre ce devoir très à cœur et mettre son idée en application. Il ne sait pas encore que cette initiative va avoir d'immenses conséquences, même si son plan ambitieux se heurte à la réalité.


Mimi Leder, après "Le pacificateur" et "Deep Impact", sorte de contrepoint parfois mal équilibré au tonitruant et outrancier "Armageddon", livre ici l'adaptation d'un roman plein d'humanité, souvent naïf, mais qui plaira aux rêveurs et aux utopistes. Attention, cependant : on ne sombre jamais dans la candeur et l'angélisme. La réalité à laquelle les protagonistes de cette histoire sont confrontés est dure et ressemble à celle de bien des gens sur la Terre. 

Encore une fois, la réalisation de Leder est assez académique et sans audace. Cependant, il faut reconnaître qu'elle sert l'histoire plus qu'elle ne la dessert, même si on aurait apprécié un peu d'inventivité. A défaut, force est de reconnaître que l'on n'est jamais perdu dans les différents arcs narratifs qui s'ouvrent, et que la narration reste fluide. C'est un bon point auquel certains longs métrages ne peuvent pas toujours prétendre. 

Cependant, c'est surtout la très belle interprétation donnée par le grand Kevin Spacey, la gracieuse (malgré une coiffure parfois improbable) Helen Hunt et le remarquable Haley Joel Osment, tout juste sorti du "Sixième sens" qui donne à "Un monde meilleur" son humanité et, finalement, tout son intérêt. Insufflant aux héros du roman leur immense talent, et croyant en leur rôle (cela transparait à l'écran), ce magnifique trio incarne à merveille des personnages brisés par la vie, qui se relèvent, tombent à nouveau, mais continuent à vivre parce qu'une lueur d'espoir est toujours à portée de vue.
Derrière eux, on notera également la belle prestation de Jim Caviezel, Jay Mohr, de la grande Angie Dickinson et même de l'inattendu Jon Bon Jovi. Visiblement dirigés par une réalisatrice aimant ses acteurs, tous se mettent au service d'une histoire à laquelle on a envie de croire. 

L'époque n'est pas à la bienveillance, ni à la naïveté. Il n'empêche que l'utopie portée par le jeune Trevor pourra donner à certains un peu d'espoir. Sans doute trop humaniste pour rencontrer le succès dans les salles, "Un monde meilleur" mérite cependant un autre regard, évidemment bienveillant.


mardi 25 octobre 2016

Agora (2009)


Ce sont des thèmes forts que convoque "Agora" : les religions et leurs dérives vers l'intégrisme et l'obscurantisme, ceux qui mènent toujours l'humanité vers sa perte. Inspiré de l'histoire vraie de la sage Hypathie, au destin brisé par la folie d'hommes Si l'action de ce long métrage se situe plus, force est de reconnaître que ces sujets sont - hélas ! - toujours d'actualité. L'ambitieux film "Agora", réalisé par Alejandro Amenabar, n'avait pas été le triomphe escompté et mérite d'être revu. 

IVème siècle : Alexandrie rayonne. Sa bibliothèque regorge de savoir et les sages dispensent leur savoir à des élèves avides de connaissance. La philosophe, mathématicienne et astronome Hypathie, séduit tous ceux qui l'entourent par son charme et son esprit, à commencer par Oreste, l'un de ses élèves. Mais Alexandrie est aussi le théâtre de tensions entre les chrétiens, les païens et les juifs qui la peuplent. Et, déjà, les fous de Dieu comptent imposer la seule vérité qui compte à leurs yeux. 


Pour mettre en images ce péplum philosophique, Alejandro Amenabar a disposé de grands moyens qu'il utilise avec intelligence. La reconstitution de l'Alexandrie de l'époque est ancrée dans un réalisme qui fait beaucoup pour la crédibilité du film. Loin du clinquant parfois rencontré lorsque ces siècles lointains (ou pas) sont explorés par le septième art, l'Alexandrie d'Hypathie est un superbe décor pour la dramatique histoire de la brillante femme que fut la philosophe. 

Et puis, il y a l'interprétation, remarquable, de Rachel Weisz, Michael Lonsdale (décidément toujours aussi impérial, quelque soit le rôle qu'il endosse), d'Oscar Isaac (alors pas encore choisi pour devenir l'un des héros d'une célèbre licence), du jeune et convaincant Max Minghella ou de l'inquiétant Ashraf Barhom, les acteurs choisis pour incarner les protagonistes de cette confrontation entre la lumière et l'obscurantisme sont tous à saluer pour leur performance.
Les seuls défauts que l'on pourra trouver à "Agora", puisque sa forme est quasiment irréprochable, réside dans son scénario. Ne se contentant pas de l'affrontement entre intégristes et penseurs, Amenabar glisse dans son histoire quelques pincées de mélodrame et de romance, sans doute pour ne pas embourber son récit dans un réquisitoire à charge contre les religions, celles d'hier ou d'aujourd'hui. Le procédé est hélas contre-productif, même s'il donne à ses héros plus de faiblesses et donc d'humanité. 

En évitant les écueils du mélodrame sur lesquels il s'échoue parfois, "Agora" aurait pu être un grand film, traitant de sujets hélas toujours d'actualité. A défaut, il s'agit d'un beau spectacle, porteur d'un message fort. C'est déjà beaucoup plus que ce que nous propose quantité de longs métrages. 



jeudi 20 octobre 2016

Explorers (1985)


La trajectoire de Joe Dante a déjà été évoquée dans ces colonnes, avec le somptueux, mais méprisé, "Panic sur Florida Beach" ou "Burying the ex", son dernier opus, sorti directement en vidéo. La récente et très chouette série "Stranger Things" m'a donné envie de me replonger dans les films des années 1980 mettant en scène des héros d'une douzaine d'années, se transformant, le temps d'un film, en aventuriers, souvent dans un contexte fantastique. "Explorers", sorti juste après son plus grand succès ("Gremlins") connut une gestation chaotique et fut balancé sur les écrans sans être totalement terminé. Presque logiquement, l'échec fut au rendez-vous : la carrière de Dante prit un tour funeste.

Le jeune Ben passe son temps libre à regarder de vieux films de science-fiction et à rêver. Avec son compère Wolfgang, un scientifique en culotte courte de génie, et l'aide de Darren, nouveau venu dans la bande, il va vivre une aventure surprenante. Eux qui sont d'ordinaire la cible des autres enfants du collège, vont mettre au point un vaisseau spatial et rencontrer deux étranges créatures extra-terrestres, qui ont de l'humanité une drôle d'opinion...

Les grands thèmes chers à Joe Dante sont, une nouvelle fois, présents dans "Explorers" : les héros y sont des enfants à l'imaginaire développé, aimant la science-fiction, fût-elle de série B (voire Z) et souvent rejetés par leurs camarades. A l'instar du héros de "Gremlins" ou de "Burying the ex", Ben et ses copains ont beaucoup en eux du réalisateur de ce film bancal. 
Après une première partie portant un regard tendre sur ses héros, on vire dans une sorte de n'importe quoi en plein espace. Les gamins se retrouvent dans un étrange vaisseau, peuplé de créatures qui auraient plus leur place dans le "Muppet Show" que dans "Alien". Dans cette partie du film, c'est plus l'embarras que la tendresse qui envahit le spectateur. Alors, certes, on pourra accabler la production du long métrage, dont les circonstances furent catastrophiques mais le fait est que le résultat à l'écran n'est pas (dans cette partie, en tout cas) très probant. Il faut attendre le retour sur Terre pour que revienne le ton doux-amer et rêveur du début du film, digne de Joe Dante.

En mettant à contribution de grands noms du cinéma fantastique (Rob Bottin, qui créa, entre autres, les créatures du "Legend" de Ridley Scott, Jerry Goldsmith à la bande originale, ou les magiciens d'I.L.M.), "Exporers" est cependant une réussite technique. Les effets spéciaux, avec trente ans de recul (déjà !) ont plutôt bien vieilli et sont à porter au crédit du film. On remarquera également la belle interprétation des jeunes Ethan Hawke, River Phoenix et du plus discret Jason Presson, une constante dans le cinéma américain de ces années. Il faut hélas déplorer la version française, particulièrement médiocre (surtout en ce qui concerne le doublage des facétieux extra-terrestres).

C'est un sentiment de déception et de regret qui envahira le spectateur se lançant dans un (re)visionnage de "Explorers". Si on y lit à maintes reprises l'amour immodéré de Joe Dante pour la science-fiction et, plus largement, les rêves de gosses qui s'aventurent au-delà du réel, sa concrétisation (dans des conditions chaotiques, rappelons-le) donne un film à peine terminé, souvent raté, parfois émouvant. Marquant le début de la fin pour son réalisateur, "Explorers" laisse un goût amer, alors qu'il aurait pu être enthousiasmant.








samedi 15 octobre 2016

John Carter (2012)



Avant que Disney ne s'empare, à grands coups de dollars, de Lucasfilm, il y eut de la part du géant aux grandes oreilles une tentative d'incursion dans la science-fiction. Utilisant comme matériau de base le roman "Une princesse de Mars" d'Edgar Rice Burroughs (le papa de Tarzan), Disney s'aventura sur les terres de George Lucas, le space opera. Il est intéressant de noter que, depuis Star Wars, aucune autre saga sidérale n'a réussi à s'implanter durablement et à générer un triomphe comparable. A ce titre, l'expérience "John Carter" (budgetée aux alentours de 250 millions de dollars) est déjà louable. Malheureusement, elle se solda par un des échecs commerciaux les plus mémorables de ces dernières années.

Mars n'est pas la planète qu'on croit : il s'y déroule des luttes entre des peuples ennemis depuis toujours. Sur Barsoom (le nom qu'elle porte là-bas), les martiens rouges (ressemblant aux humains) se déchirent, tandis que les martiens verts (des humanoïdes de grande taille à quatre bras) tentent de se maintenir à l'écart du conflit.
Sur Terre, John Carter, soldat de l'Etat de Virginie, poursuivi par l'armée américaine et les Amérindiens, se retrouve propulsé sur la planète rouge sans comprendre ce qui lui arrive. Il devra faire ses preuves et devenir un héros...

Le roman "Une princesse de Mars",  d'Edgar Rice Burroughs (le papa de "Tarzan", accessoirement) a probablement nourri bon nombre de réalisateurs de science-fiction. Burroughs, l'un des pionniers de la science-fiction, aurait mérité depuis des décennies qu'on lui rende hommage autrement qu'en digérant lentement son oeuvre, pour n'en livrer ça et là que quelques traces d'un legs indéniable. Car le plus grand défaut du "John Carter" de 2012 (il en existe une autre adaptation, datée de 2010 et sortie directement en vidéo), c'est d'arriver trop tard, tel le fils légitime et prodigue revenant au foyer après que l'héritage ait été dilapidé. 

A la réalisation, on retrouve un ancien de Pixar (vous savez, l'ancienne division "animation" de LucasFilm, avalée il y a quelques années par...Disney, décidément) : Andrew Stanton, qui avait fait preuve d'un énorme talent créatif sur le génial "Wall-E" et "Le monde de Nemo". A la réflexion, pour réaliser un film gorgé d'effets spéciaux numériques, c'était sans doute l'un des meilleurs choix : le fait est que Stanton fait montre de tout son talent dans certaines séquences où il arrive à faire oublier la présence des fonds verts.

Il y avait de la matière, dans le roman originel de Burroughs (dont le personnage apparaît furtivement dans le film), d'une densité telle qu'on s'y perd un peu, du moins dans la première heure du film qui aurait gagné à être simplifiée. A force d'ellipses et parce qu'il injecte beaucoup de personnages, d'enjeux et de nouveautés, "John Carter" peut dérouter, voire perdre une partie de son public. Il faut attendre la seconde heure du film pour que l'épopée l'emporte et qu'on prenne vraiment plaisir au spectacle. C'est dommage, parce que cet univers avait un réel potentiel et surtout un ton unique, quelque part entre space opera et steampunk

On pourra déplorer le jeu un peu fade de Taylor Kitsch, qui incarne John Carter sans foi ni charisme. De même, le scénario n'est en rien novateur et ne surprendra pas les amateurs du genre. Cela dit, la réalisation de Stanton et l'esthétique du film sont souvent de haute volée. Ajoutez à cela une superbe bande originale de Michael Giacchino (qui assurera prochainement la partition de "Rogue One") et vous comprendrez que les atouts de film sont à la hauteur des regrets qu'il inspire. 

Mais le fait est que "John Carter", sans être le film du siècle, est un honnête divertissement, sabordé par la façon dont il fut vendu au public : un space opera, dont les affiches annonçaient qu'il était destiné aux enfants, tout en affichant clairement son côté adulte : de quoi y perdre son latin. Ce n'est pas la première fois qu'on peut se faire cette réflexion, ni la dernière, mais le fait est que Disney semble ne plus savoir vendre un film. 

On connaît la fin de l'histoire : le film fut un gouffre financier qui eut raison du président de Walt Disney Studios, débarqué après ce cuisant échec. La boîte à Mickey s'en remit cependant fort bien, en achetant quelques mois plus tard LucasFilm (pour quelques milliards de dollars) : plutôt que de loucher sur le succès de la licence Star Wars, autant s'en emparer. Une fois de plus, Disney prouva qu'il savait vendre des licences, mais pas des univers.

Mais, si "John Carter" avait eu le succès qu'il méritait, l'histoire aurait été radicalement différente, sans doute...


lundi 10 octobre 2016

Le dernier combat (1983)


En regardant dans le rétroviseur, récapituler la carrière de Luc Besson, devenu en quelques années l'un des grands manitous du cinéma français, peut être instructif. Si chacun connaît ses longs métrages les plus célèbres, on oublie souvent que son premier film, "Le premier combat", était né dans la souffrance, ses producteurs devant financer au jour le jour le tournage de ce film post-apocalyptique en noir et blanc, sans une ligne de dialogue. 

L'humanité a fini par s'anéantir, ou presque. Il ne reste qu'un champ de ruines et quelques survivants qui tentent de continuer à subsister, quitte à s'entre-tuer pour assurer leur survie. Le cataclysme a eu pour effet majeur la perte de parole chez tous les humains, et la quasi-disparition des femmes. Parmi eux, un homme trouve refuge dans une ville détruite, auprès d'un vieux médecin que la folie guette. Les menaces sont multiples, autour d'eux...

Dès ce premier opus, on retrouve quelques-unes des constantes de ce qui sera la "patte" Besson (celle qu'il perdit finalement en accédant au succès, pourrait-on déplorer) : la musique omniprésente de son complice Eric Serra, ses interprètes fétiches (Jean Reno, encore tout jeune, ou l'irremplaçable Jean Bouise) et une ambiance particulière, entre drame et humour, comme imprégnée de la culture BD où Besson s'abreuva tant de fois. Développant sur la longueur son court-métrage "L'avant-dernier", il se lance ici dans l'aventure en bricolant un film de genre. L’exercice était audacieux, surtout quand on sait la frilosité hexagonale dans ce registre. 

Au regard du chemin parcouru par Luc Besson depuis ce premier opus, flirtant avec le film d'auteur, par son format et ses choix tant esthétiques que narratifs, on peut émettre des regrets sur ce que ce réalisateur aurait pu devenir, s'il avait par la suite fait d'autres choix. En effet, malgré ses imperfections (en partie inhérentes au peu de moyens de l'entreprise, en partie parce qu'elles préfigurent ce que sera Besson plus tard), il faut reconnaître au "Dernier combat" une véritable audace et un intérêt certain, surtout si on le replace dans son époque. Sans être un film majeur, il a le petit supplément d'âme dont sont dépourvus pas mal d'autres longs métrages. C'est déjà ça, même si l'histoire nous dit que cette âme a vite été diluée, voire broyée, quand à l'apprenti-artiste a succédé l'homme d'affaires. 

Monté avec des bouts de ficelle, mais bénéficiant déjà d'un certain talent de réalisateur, "Le dernier combat" reçu le Grand Prix du Festival d'Avoriaz en 1983. Luc Besson put alors mettre en scène "Subway", avant de connaître le triomphe public avec "Le grand bleu". L'histoire d'un homme de cinéma était en marche. Ses ambitions de l'époque étaient toutes autres de celles du producteur qu'il est devenu. Après la sortie du "Dernier combat", et son relatif échec commercial, il se brouilla avec son coproducteur, acteur et co-scénariste, Pierre Jolivet, et choisit de suivre sa propre route. En voyant là où elle l'a mené aujourd'hui, il est permis d'émettre quelques regrets.


mercredi 5 octobre 2016

Revolution (1985)


Au rang des films ayant été un tel désastre qu'ils condamnèrent la carrière de leur réalisateur, on songe souvent à "La porte du paradis". L'exemple britannique de "Revolution", mis en image par Hugh Hudson, pourtant auréolé pour "Les chariots de feu" et "Greystoke, la légende de Tarzan", est moins connu, mais tout aussi exemplaire. Narrant les aventures d'un américain devenant héros malgré lui et porté par Al Pacino, ce film mettait en lumière la révolution américaine, l'aube d'une grande nation. Hélas, à sa sortie, ce fut un échec public et critique comme on en vit rarement. 

1776 : tandis que l'insurrection contre l'occupant anglais commence, un émigrant écossais, Tom Dobb, n'aspire qu'à vivre en paix avec son fils, seule famille qui lui reste.  Quand celui-ci est enlevé par les Anglais, Dobb va s'engager dans un combat qui n'était pourtant pas le sien. Après avoir connu l'horreur des batailles et la honte de la fuite devant la mort, il va traverser maints périls et croiser nombre de protagonistes. L'histoire est en marche. 


Une chose est certaine, au visionnage de "Revolution" : Hugh Hudson a disposé de moyens conséquents pour mettre en images cette fresque. Qu'il s'agisse des décors ou des costumes, force est de reconnaître qu'on en a pour son argent. Seulement, la forme n'a jamais compensé un fond maigrichon et c'est là qu'est le défaut majeur (et rédhibitoire) de "Revolution". En effet, le scénario du film, particulièrement décousu, peine à entraîner le spectateur dans la tourmente qu'il est sensé décrire. Tandis que son personnage principal subit mille avanies, à la recherche de son fils ou en compagnie de celui-ci, sans parfois de cohérence entre elles, Pour faire court, tout ça ne tient pas toujours debout. Et, lorsqu'on se targue de vouloir faire un film historique, ça fait désordre, comme disait l'autre.

Il y eut quelques circonstances atténuantes dans la production de "Revolution", c'est vrai. Le grand Al Pacino, sur qui tout le film repose, était malade durant la plus grande partie du tournage (et cela se voit) et nombre d'interprètes reconnurent que ce film fut pour eux une épreuve propre à les dégoûter du septième art (comme Annie Lennox, à l'époque moitié du groupe Eurythmics). Mais, sans doute dépassé par l'ampleur de l'entreprise et par le naufrage annoncé, Hudson semble impuissant à limiter (et a fortiori à réparer) les dégâts. Si la mise en scène reste potable (l'homme sait filmer, et le prouva par le passé), le montage et la bande originale (dramatiquement inappropriée) parachèvent le désastre. 

On pourra se consoler en profitant de l'esthétique du film, sans doute son plus bel atout (et probablement le seul), mais cela n'est pas suffisant pour consoler les cinéphiles, et plus largement les amateurs d'histoires bien filmées. La révolution américaine, événement majeur dans l'histoire de ce grand pays et dans celle du monde, aurait mérité mieux.