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vendredi 22 janvier 2016

Le combat ordinaire (2014)


Drôle d'idée que celle d'adapter, pour le grand écran, la bande dessinée de Manu Larcenet, "Le combat ordinaire". Drôle d'idée, d'autant plus que le dessinateur avait refusé jusque là l'idée même d'un passage au grand écran de cette oeuvre. Il faut croire que Laurent Tuel (déjà flashé dans ces colonnes pour le très oubliable "Premier cercle") ait été persuasif, puisqu'il se vit confier la tâche de faire passer le combat ordinaire de Marco, le héros de la BD, sur les écrans noirs de nos nuits blanches. Malheureusement pour lui, le public n'a pas suivi. Autant les albums furent couronnés de succès (plus de 600 000 exemplaires, un score atypique, au regard du marché), autant le film fut un four, lors de sa sortie en salles.

Marco, photographe revenu des champs de bataille, livre un combat intérieur. Entre les images qu'il a du affronter, la maladie d'Alzheimer qui s'attaque à son père, sa peur de tout engagement, il n'y arrive tout simplement pas. Et puis, il y a ce voisin, qui n'est pas ce qu'il affiche, cette jolie vétérinaire qui soigne le chat de Marco et touche son cœur, le chantier naval et les anciens potes de Marco.
Il y a la vie, et il a du mal avec elle.

Difficile d'évoquer les bandes dessinées de Manu Larcenet sans sombrer dans l'éloge dithyrambique. Qu'il s'agisse de son monumental "Blast", du "Retour à la terre" (scénarisé par Ferri) ou de sa récente adaptation du "Rapport de Brodeck", cet échappé de Fluide Glacial s'impose comme l'un des maîtres du neuvième art hexagonal. Ses derniers albums, fouaillant l'âme humaine et ses turpitudes, sont à n'en pas douter de futurs classiques. A l'heure où la bande dessinée intéresse de plus en plus les producteurs cinématographiques, il était inévitable qu'un des opus de Larcenet passe sur le grand écran. Le problème est que "Le combat ordinaire" est un combat tout intérieur et que, par définition, il passe mal à l'écran. 

Pour narrer les angoisses des personnages, ceux qui sont passés avant Laurent Tuel choisit de filmer
au plus près, souvent caméra à l'épaule, ce qui est sans doute une bonne idée. Il choisit également d'adapter en un seul film les quatre albums composant "Le combat ordinaire", mais n'obtient cependant pas un film dense et rempli. Au contraire, à plus d'une reprise, on a la sensation de ne faire qu'effleurer le véritable sujet. Sans oser approfondir sa démarche et faute de pouvoir s'affranchir du support initial, le film reste enfermé dans ses cases. N'offrant pas au spectateur la possibilité d'aller plus avant dans la tête de ses personnages (ce que le matériau d'origine rendait facile, aussi étonnant que ce soit), "Le combat ordinaire" laisse une impression de superficialité et parfois de vide.

C'est l'interprétation qui sauve "Le combat ordinaire". Qu'il s'agisse de Nicolas Duvauchelle, de Maud Wyler, de Liliane Rovère, d'Olivier Perrier ou d'André Wilms, sans oublier les seconds rôles, tous remarquables, les acteurs donnent vie aux personnages de papier créés par Manu Larcenet. Le regret est d'autant plus fort : malgré des protagonistes pleins de cette humanité qui suintait des dessins originaux, le long métrage est souvent froid, comme s'il se contentait de voir, alors qu'il fallait regarder de près.


vendredi 30 janvier 2015

Le premier cercle (2009)


Les familles criminelles sont un thème récurrent du cinéma. On ne compte plus les films explorant les dynasties maffieuses, réussis ou non. Qu'il s'agisse de l'incontournable « Parrain », du « Grand pardon » ou du « Clan des Siciliens », évoquer ces clans vivant de sombres trafics et de la mort est presque devenu un genre à part entière. Mais l'exercice de style est périlleux et ceux qui s'y sont cassé les dents sont légion. Laurent Tuel, déjà remarqué avec la comédie "Jean-Philippe" (avec Fabrice Luchini et Johnny Halliday), pourrait en témoigner : son "Premier Cercle" lui valut un échec cuisant en salles. 

Cette fois-ci la famille est arménienne et se nomme Malakian. Milo, le père règne sur son clan, tout en se préparant à quitter les affaires, pour les laisser aux mains de son fils, Anton. Seulement, celui-ci aimerait bien rompre la tradition familiale et ne demande pas mieux que de se ranger des voitures. Depuis qu'il est tombé amoureux d'Elodie, jolie infirmière, il n'aspire plus qu'à une chose : sortir du cercle criminel dans lequel il évolue depuis sa naissance. Le braquage ambitieux que prépare Milo sera donc son dernier fait d'armes, et l'occasion pour le père et le fils de régler leurs comptes.

Comme l'indique le résumé que je viens d'en faire, les thèmes convoqués par "Le premier cercle" font partie des grands classiques du cinéma. Hélas, on peut, pour ce film, parler de clichés, enfilés les uns derrière les autres comme des perles. Outrancièrement prévisible, le scénario est particulièrement pauvre en surprises, accumulant les sensations de déjà-vu (et revu). Sur le fond, donc, rien de neuf, sous le soleil. Et ce dernier est particulièrement présent dans ce long-métrage. Il faut croire que "Le premier cercle" a été tourné par très beau temps. Ou alors qu'il y avait un stock de filtres jaunes dont Jean-Pierre Jeunet voulait se débarrasser. Toujours est-il que la lumière baignant presque chaque plan du film, en plus d'être très artificielle, nuit au réalisme de l'ensemble. L'image est léchée, certes, mais elle n'a pas l'impact qu'aurait pu lui donner une photographie plus sale et une réalisation plus nerveuse.
Circonstance aggravante : le casting ne fonctionne pas. Qu'il s'agisse de Jean Reno, monolithique et visiblement peu convaincu par son rôle de patriarche, de Gaspard Ulliel, laissé à lui-même et versant dans l'excès, de Sami Bouajila, à peine crédible en flic tenace, malgré l'énergie qu'il déploie, ou de Vahina Giocante, réduite au rôle de faire-valoir, les acteurs du "Premier cercle" semblent emprisonnés dans leurs personnages et les clichés qu'ils véhiculent.

Enfin, la bande originale, totalement inappropriée (les envolées lyriques au piano auraient parfaitement convenu à une romance ou une tragédie, mais sonnent totalement faux ici) parachève le tableau. A ne pas croire totalement en l'histoire qu'ils veulent nous raconter, les artisans du "Premier cercle" ne font jamais adhérer le spectateur à celle-ci. Les familles qui ont précédé le clan Malakian ont encore de beaux jours devant elles...