mercredi 8 juillet 2015

Les combattants (2014)


Il est des films que la critique assassine et que le public va voir en masse : les cas abondent et je ne vous en ferai pas l'inventaire. A l'autre bout du spectre, certains films encensés par les chroniqueurs n'attirent que peu de spectateurs. C'est à se demander s'il existe une corrélation entre succès critique et public. Salué par la majeure partie des critiques, couvert de récompenses (au Festival de Cannes, ou lors de la cérémonie des César qui lui décerna celui de "meilleur premier film) "Les combattants" n'a été entraîné qu'environ 125 000 spectateurs dans les salles obscures. Au vu du petit budget de ce film, cela pourrait paraître satisfaisant, mais cela reste peu, en comparaison avec d'autres longs métrages.

A la mort de son père, Arnaud apporte son aide à son frère aîné dans l'entreprise familiale de menuiserie. Mais en réalité, Arnaud ne sait pas trop quoi faire de sa vie. Cet été là, entre le travail, ses amis, la plage, il se laisse porter par le courant. Et il croise la troublante Madeleine, une fille toute en muscles et toujours en défense, persuadée que la fin est proche. 
Quand elle s'engage dans l'Armée de Terre pour un stage de survie, Arnaud suit ce drôle de bout de femme.

Voilà un film qui laisse difficilement indifférent et en surprendra plus d'un. On y suit, souvent étonné, le parcours de deux jeunes gens sur le point de basculer dans le monde adulte et qui décident de l'affronter chacun à leur façon.  Inattendu et souvent dérangeant, "Les combattants" brosse sur un ton parfois documentaire, le portrait d'une jeunesse à qui le monde fait peur et qui ne sait trop par quel bout le prendre. Devant les épreuves qui s'annoncent, seront-ils suffisamment prêts ?

Pour un premier long métrage, "Les combattants" est d'une impressionnante maîtrise, du début à la fin. Les deux enfants perdus au centre de cette histoire de survie parleront à de nombreux spectateurs. Nous sommes dans une époque de lutte larvée, et ceux qui entrent dans l'âge adulte, comme Arnaud et Madeleine, basculent d'un seul coup dans un univers qui peut en effrayer plus d'un. Même s'il n'est sans doute pas le chef d'oeuvre annoncé par quelques critiques enthousiastes, ce portrait d'une génération au bord du gouffre aurait pu être l'étendard d'une jeunesse inquiète. 

Les personnages sont bien trempés, loin d'un manichéisme dont le cinéma abuse parfois, tout simplement humains. Et, pour les incarner, Thomas Cailley a choisi de magnifiques acteurs : Kevin Anaïs et Adèle Haenel, qui portent le film à bout de bras et méritent à eux seuls le déplacement. Toute en tension, que ce soit physiquement ou verbalement, Adèle Haenel campe ici un personnage féminin qui fera date, tandis que Kevin Anaïs livre une interprétation toute en nuances. D'ailleurs, l'un et l'autre reçurent un César en début d'année, pour leur performance dans ce film. A mon sens, cette récompense fut des plus méritées.

Sans doute trop inattendu pour séduire un large public, "Les combattants" aurait cependant mérité d'être vu par plus de monde. Si, pour une fois, la reconnaissance du public avait été à la hauteur des critiques, c'eût été justice.






12 commentaires:

  1. J'ai adoré ce film, un de mes chouchous de l'an dernier et j'étais très heureuse pour ses 3 César ! Effectivement, un film frais sur notre jeunesse, qui mélange habilement les différents genres grâce à une mise en scène maîtrisée et construite. Et puis j'adooore Adèle en warrior qui parle mal et vite et qui fout des coups de boule (j'avoue me reconnaître un peu en elle) et forme un beau couple avec Kevin Azais, une belle révélation.

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    1. J'ai été emballé par ce film, comme tu as pu le lire...et par ses personnages, si forts, si vrais.
      Merci de ta fidélité, Tina.

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  2. Même coup de cœur pour moi également et qui, même s'il n'atteint pas les entrées records des "Profs", a su par le bouche à oreille intéresser un petit nombre de spectateurs. C'est en tous cas un film que je reverrais avec plaisir.

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    1. Ah oui, là, on est aux antipodes des "Profs"...et on y est drôlement bien, je trouve.
      Je pense que je le reverra aussi, tant il est porteur de sens.
      Merci d'être passé, Prince.

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  3. Aaaaaaaah ça fait plaisir de voir que le film t'a plu, Laurent ! J'abonde dans le même sens et, plus il vieillit dans ma tête, plus "Les combattants" me plaît. Je le reverrai sans doute un jour et j'espère que ce sera avec un même plaisir.

    Pour compléter ce que tu dis très bien, j'ajouterai simplement qu'en plus d'être un film sur la jeunesse qui s'inquiète de l'avenir, c'est aussi et surtout un film sur la jeunesse qui prend son destin en mains. Et du coup, je trouve que l'optimisme finit par prévaloir !

    Et on fait quoi maintenant ? On reste à l'affût, bien sûr ! :)

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    1. Bonjour Martin. Ton point de vue est intéressant, et je le partage : cette jeunesse prête à tout pour survivre regonfle le moral.
      Restons éveillés !

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  4. Bonjour Laurent, j'avais trouvé la première partie du film intéressante. Quand les deux jeunes se retrouvent seuls dans la forêt, j'avoue que je suis restée sur le bord, cela ne m'a plus du tout intéressée. Bonne journée.

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    1. Bonjour Dasola. La deuxième partie peut décontenancer, voire décevoir, c'est vrai. Libre à toi d'entrer ou pas dans la forêt...
      Merci du passage.

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  5. Je ne l'ai jamais vu mais il me tente bien. Je viendrais te donner mon avis dès que je l'aurais vu.

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  6. Je n'ai pas totalement adhéré à l'histoire mais je lui reconnais son originalité et je suis contente de voir ce genre de films en France. Certains passages m'ont laissée assez sceptique et je me suis parfois un peu ennuyée mais globalement, je comprends le succès critique. Les jeunes acteurs sont très bons, la réalisation est intéressante et l'histoire est crédible. On n'est pas dans une énième comédie mettant en scène des bobos parisiens en qui personne ne se reconnaît. Les questions qui animent Arnaud et Madeleine sont celles de toute une génération donc on a l'illusion du vrai (base de toute narration)

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    1. Ce film, même s'il emprunte des chemins inattendus, sonne "vrai". Tu le soulignes à juste titre et je te rejoins sur ce point.
      Merci de ta fidélité à ce blog, Mel

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