Le cinéma français donne lieu à nombre de critiques, souvent justifiées. Entre les comédies prévisibles et les films d'action louchant vers le modèle américain, certains producteurs choisissent parfois la facilité. D'autres œuvres, plus confidentielles, ne se livrent qu'à un public restreint. Le dernier film de Sophie Fillières, "La belle et la belle", qui mettait en scène Sandrine Kiberlain, n'a pas rempli les salles des multiplexes à sa sortie. Choix délibéré ou maladresse de distribution ? Sommes-nous passés à côté d'un grand film français.
Margaux, quarante-cinq ans, est professeur d'histoire-géographie à Lyon et n'a pas fait grand-chose de sa vie. En se rendant à Paris pour l'inhumation d'Esther, qui fut sa meilleure amie autrefois, elle rencontre, à la faveur d'une soirée, Margaux, vingt ans. Très vite, elle va comprendre que la jeune fille et elle ne sont qu'une seule et même personne, à vingt ans d'écart.
Voilà pour elle(s) l'occasion de changer ce qui peut l'être encore.
Ou pas.
Avec un pitch pareil, qui peut mêler comédie, drame et fantastique, on pouvait espérer un traitement ambitieux. La réussite, sur un sujet pareil, devrait être à la hauteur de la prise de risque. Inutile de se leurrer plus longtemps : "La belle et la belle" se dégonfle très vite.
D'une idée de base prometteuse, Sophie Fillières ("Arrête ou je continue") ne livre finalement qu'un film qui tourne en rond et ne va pas plus loin que le bout de son nez. La rencontre entre les deux Margaux ne donne pas grand-chose sur leurs parcours, en dehors d'un subtil échange de leurs couleurs vestimentaires.
C'est d'autant plus rageant qu'il y avait maintes façons de traiter le pitch original, mais que le scénario s'enlise dans les tourments amoureux (ou pas, d'ailleurs) de Margaux et pédale souvent dans la semoule. Et si (ce n'est qu'un exemple, qui m'a traversé l'esprit lors du visionnage) tout ce voyage n'était qu'un délire dans l'esprit de l'héroïne, une psychose née de ses regrets, de ses remords ? Mais Sophie Fillières préfère raconter l'histoire de deux femmes qui n'en sont (peut-être) qu'une seule, gravitant autour d'un même homme (dont on se demande ce qu'elles lui trouvent, soit dit en passant) et dont les dialogues sont parfois totalement farfelus (le coup des "crachats", par exemple, est éloquent).
On pourrait se consoler avec l'interprétation des acteurs, mais il faut bien avouer que, pour une fois, cet argument ne fonctionnera pas. Sandrine Kiberlain n'est pas toujours convaincante (parce que, peut-être, pas toujours convaincue), tandis qu'Agathe Bonitzer (la fille de la réalisatrice) se contente de faire la tête la plupart du temps. Entre elles, Melvil Poupaud, autour de qui ces deux femmes pivotent, fait le minimum syndical.
J'aurais aimé aimer ce film, pour son idée de base. Il aurait cependant fallu que son traitement soit suffisamment ambitieux et audacieux pour qu'il tienne ses promesses. Tournant en rond et se regardant souvent le nombril, "La belle et la belle" n'est finalement qu'un de ces films français, qui semble mépriser l'histoire qu'il raconte au public. Dommage...
Salut Laurent.
RépondreSupprimerOutche ! On sent bien ta déception... j'ai lu plusieurs autres chroniques sur le film, qui parlaient également d'ambition non tenue (ou de mauvais film, carrément). Cela m'a pour l'instant décourager de m'y frotter. Un jour, peut-être...
Tout de même ! Gâcher son talent quand on s'appelle Melvil Poupaud ou Sandrine Kiberlain, c'est dommage ! Il me reste à espérer qu'au moins eux, ils sont contents de leur travail.
Bon week-end, l'ami ! ;-)
Hello Martin. Effectivement, ce film m'a donné l'impression qu'il tournait en rond, et se regardait tourner en rond. Dommage !
SupprimerBonne fin de dimanche, ami cinéphile !