samedi 20 avril 2019

La vie domestique (2013)




Quand le cinéma s'attache à montrer le quotidien, il se prive en général d'une bonne part de l'audience réservée à des films bigger than life. Cela se comprend : nombreux sont les spectateurs désireux de s'évader et choisissant, en entrant dans une salle obscure, le dernier film à grand spectacle que leur propose leur multiplex préféré. D'autres films, plus intimistes, narrent la vie de gens "normaux" et ne recueillent pas toujours un grand succès. Dans "La vie domestique", Isabelle Czajka s'attachait à un personnage de femme "ordinaire" et à sa vie "normale". Parce qu'Emmanuelle Devos en tenait le premier rôle, j'ai voulu en avoir le cœur net et lui donner une deuxième chance.

Juliette vient d'emménager, avec son mari et ses enfants, dans une zone pavillonnaire cossue de la région parisienne. Là, tout le monde a peu ou prou la même maison, la même existence. Ses voisines lui ressemblent, avec leur quarantaine, leur vie bien réglée de femmes au foyer. Est-elle heureuse ? Juliette en doute, même si, tout autour d'elle, toutes et tous revendiquent ce bonheur.

Vingt-quatre heures de la vie d'une femme, voilà ce que nous propose ce film, qui aurait pu emprunter son titre à l'un des classiques de la littérature. Au cours de ces heures tellement semblables aux précédentes (et, sans doute, aux suivantes), le personnage principale de "La vie domestique" est l'objet de toutes les attentions et de tous les questionnements. Car, bien que sans doute arrivée à ce qu'elle pouvait espérer de mieux, Juliette doute : alors, c'est ça, la vie ? Ce vide, ce rien, finalement ?

Le personnage d'Emmanuelle Devos contemple le vide de sa vie, ses renoncements et ce que beaucoup considèrent comme une existence heureuse. L'est-elle ? Sûrement pas. Le serait-elle, si elle avait fait d'autres choix ? Cela n'est même pas sûr. En transposant le roman  "Arlington Park" (de Rachel Cusk), la réalisatrice Isabelle Czajka dresse ici un constat amer qui pourrait bien coller le bourdon à pas mal de ménagères de moins de cinquante ans (ainsi qu'à d'autres, d'ailleurs). Il se passe peu de choses, dans "La vie domestique" et nombreux sont ceux qui s'y ennuieront, mais ce film a au moins le mérite d'examiner à la loupe un véritable échantillon d'humanité (pas la moins bien lotie, cela dit).

Ne nous mentons pas : la divine Emmanuelle Devos est la meilleure raison de visionner ce film, chronique d'une vie ordinaire, tellement proche de nous, et finalement assez sinistre. A ses côtés, les prestations de Julie Ferrier, Héléna Noguerra et Ludivine Sagnier, comme autant de variations probables de sa trajectoire de femme, paraissent bien pâlottes et ne font que mettre en évidence l'immense talent de l'interprète principale (cela dit, il se peut que je ne sois pas totalement impartial, puisque j'admire particulièrement Emmanuelle Devos).

Si "La vie domestique" est impeccablement réalisé et met en valeur sa merveilleuse actrice principale, on peut cependant lui reprocher son manque de substance. A raconter le vide, c'est ce à quoi ce film s'expose. Pour cette raison, il déplaira à bon nombre de spectateurs mais pourra trouver son public parmi celles et ceux adeptes d'une certaine forme de contemplation.


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