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vendredi 5 avril 2019

Voyez comme on danse (2018)




Après une jolie carrière d'acteur, commencée avec ses copains du Splendid et ayant bifurqué vers des horizons inattendus (souvenez-vous de "Tenue de Soirée"), Michel Blanc s'est affirmé en tant que scénariste, dialoguiste et réalisateur. Il a fait bien du chemin, depuis "Marche à  l'ombre" et on se rappelle de "Embrassez qui vous voulez", film choral où le temps des vacances était celui des règlements de compte et des confrontations pour ses personnages hauts en couleur. L'an dernier, Michel Blanc a eu l'idée de donner une suite à ce film plutôt sympathique, avec "Voyez comme on danse". Cette fois-ci, ça a moins bien fonctionné, du moins dans les salles obscures.

Vincent, le mari de Lucie, est persuadé d'être suivi en permanence et devient paranoïaque. Sa maîtresse, Serena, commence à douter de ses promesses. Son fils Alex apprend qu'Eva, sa petite amie de dix-sept ans, est enceinte de lui. Véro, la mère d'Eva, a bien du mal à joindre les deux bouts. De son côté, Elizabeth, la riche amie de Véro et de Lucie, découvre que son mari, Bertrand, a compromis l'entreprise qu'elle possède. 
Dans le petit groupe d'amis, c'est à qui aura le plus de soucis, on dirait...

Si "Embrassez qui vous voulez" était adapté d'un roman de Joseph Connolly, la suite qu'a voulu lui donner Michel Blanc ne fait qu'en reprendre les personnages, du moins une partie de ceux-ci. Exit, pour cet opus, ceux incarnés par Denis Podalydès ou Vincent Elbaz, par exemple. Donc, on prend (presque) les mêmes et on recommence à montrer les défauts des personnages qui, au contact les uns des autres. L'idée est généreuse et pourrait donner quelque chose d'amusant, si l'exercice était autre chose qu'un décalque du premier opus.


Quinze ans plus tard, les personnages de "Embrassez qui vous voudrez" ont vieilli, mais ont finalement assez peu changé. Paradoxalement, si l'on est assez content de les retrouver (pour ceux qui reviennent), la mécanique qui sous-tend le film a moins bien vieilli que ses interprètes. Ce qui fonctionnait avec "Embrassez qui vous voudrez" est plus bancal, quinze années après. Et, surtout, ce qui n'y fonctionnait qu'à moitié ne marche plus du tout.

Heureusement, il y a les acteurs, et particulièrement Carole Bouquet, décidément très à l'aise avec ce que lui sert Michel Blanc, qui illumine chacune des scènes dans lesquelles elle apparaît. J'ai trouvé moins convaincante les prestations, un peu trop poussées, de Jean-Paul Rouve ou de Karin Viard, mais cela relève sans doute d'une sensibilité personnelle. 


On se délectera également de quelques excellentes saillies verbales, nous rappelant le grand talent de dialoguiste de Michel Blanc, qui font toujours mouche, même si certaines scènes semblent être là pour les amener, alors que ce devrait souvent être l'inverse. 

Alors, cette suite était-elle une fausse bonne idée ? S'agit-il d'un demi-échec ou d'une semi-réussite ? A l'instar du verre à moitié plein ou à moitié vide, chacun peut se faire sa propre appréciation, en visionnant ce film. Qui sait si Michel Blanc proposera, dans quelques années, un troisième opus ?


dimanche 4 mars 2018

Les grands ducs (1996)


Parmi les réalisateurs français, Patrice Leconte fait partie de ceux dont les films ont réuni des millions de spectateurs. Ne serait-ce qu'avec les comédies qu'il réalisa pour l'équipe du Splendid, chaque diffusion est synonyme de forte audience. Pourtant, lorsqu'il fit un virage serré vers le drame, notamment avec "Tandem" ou "Le mari de la coiffeuse", Patrice Leconte prit des risques et échoua parfois. Après le triomphe public et critique de "Ridicule", la comédie "Les grands ducs" fut boudée par le public, et dut attendre des années avant d'être véritablement considéré. Drôle de destin, que celui de ce film...

Has-been, ringards, dépassés : voilà ce que sont Georges Cox, Victor Vialat et Eddie Charpentier, des comédiens de théâtre rattrapés par l'âge. Mais ils ont l'amour de la comédie chevillée au corps et quand se présente à eux l'occasion de jouer les seconds rôles dans une pièce de boulevard, ils sautent sur l'occasion. Les voilà partis en tournée, comme au bon vieux temps. Mais c'est sans compter le producteur du spectacle, ruiné, et qui compte saboter le show pour toucher la prime d'assurance.

Plus de vingt après "Que la fête commence", Patrice Leconte organisa les retrouvailles de trois monstres sacrés du cinéma hexagonal : Philippe Noiret, Jean Rochefort et Jean-Pierre Marielle. C'est peu de dire qu'on a droit, dans ce film à des acteurs de talent, dont le moindre geste pourrait faire rougir de honte de jeunes prétentieux souvent en tête d'affiche. Avec de pareilles têtes d'affiche, on comprend mal, a posteriori, comment "Les grands ducs" a pu  ne pas drainer les foules dans les salles obscures. Sous couvert d'une comédie s'aventurant dans un territoire où le kitsch est revendiqué, c'est pourtant un vrai regard porté sur le métier de comédien, de saltimbanque, pourrait-on dire. 

Malgré leur statut, les trois compères prennent visiblement un plaisir un peu canaille à fouler les planches et à déclamer (souvent mal, mais c'est voulu) des textes que d'aucuns qualifieraient de médiocres. Ils n'ont pas oublié ce par quoi ils ont commencé et rendent, au travers de ce film, hommage à leurs débuts, qui les mena si haut. 

On appréciera d'autant plus la performance de ces trois merveilleux comédiens qu'elle pose un regard à la fois tendre et caustique sur le métier et le statut d'acteur. Et puis, maintenant qu'ils ne sont plus là, on mesure d'autant plus le talent de Jean Rochefort et Philippe Noiret, chacun dans un registre différent (l'un en acteur liquéfié par le trac, mais qui continue d'y aller, l'autre en charmeur au regard et à la moustache qui frise). Le troisième larron, le dernier qui nous reste, Jean-Pierre Marielle, est remarquable en vieille gloire colérique, mais est-il utile de le préciser.
Face à eux, Catherine Jacob et Michel Blanc paraissent forcément en retrait, malgré des rôles indispensables à l'intrigue improbable de ce joli hommage à l'univers de ceux qu'on pourrait qualifier de "cachetonneurs".

Ce n'est sûrement pas le plus célèbre, ni le plus réussi des films de Patrice Leconte, mais "Les grands ducs", sous ses dehors de comédie désuète, porte une immense sincérité et un véritable amour pour les acteurs et le public. Rien que pour eux, cette tendre friandise mérite d'être (re)vue.





samedi 28 janvier 2017

Un petit boulot (2015)


Pascal Chaumeil, réalisateur de "L'arnacoeur" et de "Un plan parfait" nous a quittés il y a peu, juste après la réalisation de "Un petit boulot". Son dernier film, oscillant entre policier et comédie noire, ne rencontra pas le même succès que sa précédente collaboration avec Romain Duris. Ce cocktail, trop rare dans le paysage cinématographique hexagonal, méritait-il un accueil si frileux ?

Comme tous ses copains et collègues, Jacques s'est retrouvé au chômage lorsque l'usine qui faisait vivre la région a fermé. Abandonné par sa compagne et endetté jusqu'au cou, le jeune homme se voit proposer un petit boulot par un des parrains locaux : tuer la femme de celui-ci. D'abord réticent, Jacques finit par accepter et remplit le contrat avec facilité. C'est le début d'une drôle d'histoire, pour Jacques, et peut-être d'une nouvelle vie...

En signant pour ce "Petit boulot", le spectateur est rapidement mis dans le bain : d'abord social, le ton du film prend des allures de comédie, en grande partie grâce aux dialogues (signés par Michel Blanc, auquel ce talent ne sera jamais assez reconnu), avant d'opérer un virage vers le polar, le tout mâtiné d'un brin de romance sur la fin (mais je n'en dirai pas plus, le spoiler est banni de ces colonnes). L'exercice est donc risqué, de vouloir jouer sur plusieurs tableaux, on en conviendra. Là où le film français se contente d'exploiter confortablement un seul thème, quitte à l'user jusqu'à la corde (voire plus), le regretté Pascal Chaumeil ose, avec l'adaptation du roman de Iain Levinson, une audace que l'on n'attendait plus.

Si l'exercice n'est pas totalement réussi, il faut avouer que ce film se regarde avec un vrai plaisir, du début à la fin, ce qui n'était pas arrivé depuis belle lurette dans le cinéma français populaire (non, je ne vise personne...ou presque). Certes, le mélange des genres n'est pas toujours heureux et réussi, et engendre quelques maladresses nuisant à la cohésion de l'ensemble, mais l'ensemble tient mieux qu'on ne pouvait l’espérer. Cette réussite est essentiellement due à un scénario sans temps mort alimenté par des dialogues souvent savoureux et à des interprètes très en forme, surtout en ce qui concerne les seconds rôles. 

Si la prestation de Romain Duris est efficace à défaut d'être remarquable, ceux qui le secondent apportent le supplément d'âme qui donne tout son intérêt au film. Qu'il s'agisse de Gustave Kervern, en débonnaire au bord du gouffre, de la délicieuse Alice Belaïdi, pleine de vie, d'Alex Lutz, en inspecteur sans âme, et bien évidemment du trop rare Michel Blanc, qui nous rappelle ici ses talents de scénariste et de dialoguiste au passage, ce sont eux qui permettent au film de dépasser les espoirs fondés en lui. Au passage, on regrettera la présence de la voix-off, artifice inutile et pesant, puisqu'il assiste le spectateur là où la mise en scène et le montage devraient suffire. 

C'est une agréable surprise que ce "Petit boulot" peut réserver aux amateurs de comédie noire. On est encore à plusieurs coudées sous le niveau des experts en la matière (comme les frères Coen, par exemple), mais ce film, sans être inoubliable, est très au-dessus de la moyenne du cinéma français. Certes, ce n'était pas excessivement difficile.

Ce film a été vu dans le cadre du Movie Challenge 2017, catégorie "Film français".



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mardi 6 octobre 2015

Une petite zone de turbulences (2009)


On traverse tous, dans notre parcours de vie, des périodes un peu compliquées où les événements semblent se conjuguer pour vous rendre l'existence impossible. Généralement, on en sort plus fort. Conter, par écrit ou à l'écran, ce genre de péripétie est donc presque "normal". Mark Haddon, romancier britannique (connu surtout pour  "Le bizarre incident du chien pendant la nuit") a vu son roman "Une situation légèrement délicate" (en version originale "A spot of bother") adapté au grand écran par Alfred Lot (avec la complicité de Michel Blanc aux dialogues), sous le titre "Une petite zone de turbulences". La multiplication et la longueur des titres y étaient-elles pour quelque chose ? Toujours est-il que malgré une belle distribution, le public ne se rua pas pour voir ce film et que, depuis, il est souvent rediffusé sur la TNT. Vaut-il ces séances de rattrapage ?

Ça y est, l'heure de la retraite a sonné pour Jean-Paul. Mais, alors qu'il aspirait au calme et à la sérénité, rien ne va plus. Sa fille, divorcée et déjà mère d'un petit garçon, lui annonce qu'elle se remarie, qui plus est avec "Bac moins six", un garçon bien en deçà des espoirs qu'il fondait. Sa femme le trompe avec un ancien collègue. Son fils affirme son homosexualité, quitte à se brouiller avec lui. Et puis, il y a cette tache étrange sur sa hanche. Bien qu'il s'agisse, selon le docteur, d'un bête eczéma, Jean-Paul sait que c'est un cancer. Elle commence mal, cette retraite...

Retrouver Michel Blanc dans un rôle de colérique hypocondriaque a quelque chose du plaisir coupable de cinéphile. Pour ceux qui ont été bercés aux comédies mettant en scène les acteurs du Splendid, avant son somptueux virage (notamment grâce à "Tenue de Soirée"), cet acteur a une place toute particulière. Ajoutez à cela le fait qu'il contribue aux dialogues de "Une petite zone de turbulences" et vous comprendrez mieux l'intérêt que ce film suscita pour moi. 

Soyons franc : "Une petite zone de turbulences" n'a rien d'un chef d'oeuvre, mais est néanmoins un film qui aurait mérité mieux que son traitement de défaveur lorsqu'il sortit. Porté par une mise en scène élégante et souvent adroite, le deuxième long métrage d'Alfred Lot (après "La chambre des morts") se regarde sans déplaisir et provoque souvent le sourire, voire le rire. Si son scénario n'a rien d'extrêmement surprenant, ce portrait d'un homme au bord de la crise de nerfs est souvent juste, a défaut d'être véritablement caustique. 

Heureusement, il y a les acteurs : Michel Blanc en tête, bien entendu, qui se délecte visiblement d'interpréter ici une prolongation de ses rôles historiques de râleur-hypocondriaque, mais aussi Gilles Lellouche, particulièrement fin dans l'interprétation du futur gendre mal-aimé, ou Cyril Descours, en fils homosexuel. J'émettrais quelques réserves sur la performance de Mélanie Doutey, décidément charmante, mais qui a (pour être poli) encore une belle marge de progrès. Et c'est un vrai plaisir de retrouver Miou-Miou, même si son rôle n'est pas assez mis en valeur, ou Wladimir Yordanoff, un acteur qu'on aimerait voir plus souvent sur grand écran.

Alors "Une petite zone de turbulences" n'est probablement pas la comédie familiale grinçante qu'on aurait pu obtenir. Pas assez corrosif pour faire grincer des dents et sans doute trop optimiste pour faire réellement rire, ce film vaut surtout pour son interprétation. Ce n'est pas la première fois que les acteurs sont le meilleur atout d'un film, et sans doute pas la dernière. C'est déjà cela.



samedi 29 décembre 2012

Je hais les acteurs (1986)


Oublié sous la poussière, au fond du placard des films français, "Je hais les acteurs" est sans doute inconnu de la majorité des lecteurs de ce blog. Et pourtant, ce premier film de Gérard Krawczyk (oui, celui qui commit "Taxi")et produit sous l'égide d'Alain Poiré (à qui l'on doit quelques monuments du cinéma hexagonal) disposait d'un casting à faire pâlir pas mal de producteurs actuels. Pensez donc : s'y bousculaient, sans ordre de préférence, Jean Poiret, Bernard Blier, Michel Blanc, Michel Galabru, Pauline Lafont, et j'en oublie. L'entreprise était ambitieuse et audacieuse, puisque ce film, en noir et blanc (ce n'était donc pas une défaillance de votre navigateur, soyez rassurés !) adaptait un roman de Ben Hecht (l'un des plus prolifiques scénaristes de l'âge d'or des grands studios), en se voulant fidèle au ton unique des grands films hollywoodiens.
A l'arrivée, il faut croire que les cinéphiles ne se sentirent pas interpellés par "Je hais les acteurs", lui réservant un accueil froid et des salles bien peu remplies.  Malgré une nomination au César du meilleur premier film, aujourd'hui, ce film a sombré dans l'oubli, ou presque...


Hollywood, les années quarante : un détective privé enquête sur une série de meurtres et se trouve plongé dans le monde du cinéma, dont il découvre l'envers du décor. Des producteurs sans scrupule, des acteurs à l'ego démesuré, des starlettes écervelées, des réalisateurs psychotiques (le premier qui dit que rien n'a changé depuis gagne la palme du mauvais esprit). 

Soyons clairs : le scénario n'a rien de follement original et ne surprendra guère le public. A défaut de fond, c'est surtout la forme qui est l'intérêt de ce film. Car on est ici, dans l'exercice de style appliqué, d'un côté de la caméra comme de l'autre. pour sa première mise en scène, Krawczyk s'efforce de respecter tous les codes des grands classiques qui bercèrent sans doute sa jeunesse de cinéphile. Alors, certes, tout cela peut laisser froids les cinéphiles actuels, mais il faut reconnaître que, d'un point de vue esthétique, "Je hais les acteurs" tient ses promesses. 

Pour servir cette reconstitution, Krawczyk réussit à convoquer une bonne partie de la fine fleur des acteurs français des années 80. Alors, certes, Patrick Floersheim, qui tient le rôle du détective (et celui de fil conducteur de l'histoire) n'a pas la renommée nécessaire au statut de locomotive qu'il endosse pour ce film. Mais, au cours de sa trajectoire, il croise le ghotta du cinéma hexagonal (j'en ai déjà cité un bon nombre plus haut) : Claude Chabrol, Jean-François Stévenin, Dominique Lavanant, Claire Nadeau, et même Marcel Gotlib se font visiblement plaisir en voyageant dans le temps et l'espace. Et je ne vous parle même pas de ceux qui ne firent dans ce film que des apparitions fugaces ou des participations amicales. Le plus célèbre évadé fiscal du moment, Gérard Depardieu pour le nommer, joue ici un rôle fugace (non crédité, qui plus est).

On s'en rend vite compte au visionnage, ce film est bâti sur un mensonge : Krawczyk et son producteur aiment les acteurs, infiniment, au point de leur offrir avec ce film un sublime terrain de jeu. Il eut fallu, pour que la fête soit réussie, que les scénaristes soient de la partie et épaississent un peu l'intrigue, pour faire de ce film un peu plus qu'une balade dans des décors de stuc et de plâtre. Le spectateur y aurait probablement trouvé son compte. Faute de cela, l'insuccès de cette grosse production plomba sérieusement la carrière de son réalisateur. Gérard Krawczyk réalisa ensuite le très joli "L'été en pente douce" avant de tomber sous la coupe de Besson, pour remplacer Gérard Pirès sur le tournage du premier "Taxi" (le destin est parfois cruel). Nul doute que si "Je hais les acteurs" avait connu plus de succès, sa carrière aurait pris un tout autre tournant. En attendant, les cinéphiles nostalgiques peuvent offrir à ce film une seconde chance...